• Le temps ne cicatrise pas les outrages du temps (Partie 2)

    Genre : RP

    Nom : Le temps ne cicatrise pas les outrages du temps (Partie 2)

    Personnage : Noé A. Foster

    Contexte : Suite de la partie 1

     

    Un dernier panneau indiquant le haras, à quelques kilomètres de là. Ils arrivaient. Difficile de se réjouir pour Noé, qui aurait sans doute préféré ne jamais remettre les pieds ici. Au fond, peut-être aurait-ce été mieux que le cancer prennent le dessus, et qu'il parte. Il n'aurait pas eu à vivre tout ça. Il en voulait à ses parents et aux médecins. A ses amis, qui faisaient tout pour l'aider. Au monde entier. Tout le monde le prenait pour une petite chose fragile, alors que c'était tout le contraire. Il avait tellement vécu de choses ces dernières années qu'il s'était forgé une carapace indestructible. Inviolable. Du moins, c'était ce qu'il croyait.

    Bientôt, le break ralenti, et tourna dans une allée pavée. Noé ne put qu'observer - impuissant - ce qu'il avait toujours connu. Ça et là, des cavaliers menaient leurs chevaux. Montés ou à pied. En train d'être pansés ou travaillés. Sur la droite, une groupe de chevaux à la crinière rasée évoluaient sur un immense terrain de polo. A gauche, d'élégantes bâtiments semblaient abriter les chambres et les lieux de vie des cavaliers. La moindre parcelle de paysage que Noé observait était dédiée aux chevaux. Un monde dont il avait fait le deuil. L'adolescent n'avait jamais pensé remettre les pieds à Full Horse, tout comme il avait tenté d'oublier Obiwan, Jess, et tous les autres. Mais voila que tout basculait. Il aurait du être content de pouvoir revenir, après tant de mois passés loin du Haras ! Mais non. Il était indifférent. Renfermé. Seul. Comme chaque jour depuis qu'il avait compris.

    Le coude contre la vitre et la tête appuyée sur le poing, il ne bougea pas lorsque son père, après avoir garé la voiture, coupa le moteur. Du coin de l’œil, il le vit se tourner vers lui avec un léger sourire sur le visage. Un instant, il redouta un commentaire de sa part, mais il n'en fut rien. C'était mieux ainsi. Depuis quelques mois, les parents du jeune garçon avaient compris qu'il ne servait à rien d'essayer de le sortir de son enfermement lorsqu'il n'était pas disposé à parler. Autant dire que, dernièrement, ils étaient complètement dépassés, et avaient l'impression de perdre peu à peu leur fils. Ils n'arrivaient plus à le sortir de sa solitude, ni même à percer la carapace qu'il s'était construite. Il avait son monde, et personne n'y était invité.

    Ils descendirent donc de voiture, comme si de rien n'était, et ouvrirent le coffre. Là, quelques bagages s'entassaient : des vêtements, des livres, un ordinateur portable, le strict minimum pour monter à cheval, et quelques autres babioles. Comme l'adolescent avait grandit, il avait fallu investir dans de nouvelles affaires pour son retour au Haras. Mais il n'était pas très coopératif, aussi ses parents avaient-ils acheté le strict minimum en espérant qu'il irait par la suite chercher ce qui lui manquait. Monsieur Foster pris les valises les plus lourdes, tandis que sa femme s'occupa du reste, et ferma le coffre. Comme Noé ne descendait pas, elle l'appela gentiment :

    Madame Foster : « Tu viens, Noé ? »

    L'adolescent ne cilla pas. Il ne tourna même pas la tête, le regard fixé au loin. Il regardait sans voir. Il n'écoutait pas vraiment. Bien sur, il avait entendu. Mais il savait qu'à partir du moment où il descendrait de la voiture, il prendrait de plein fouet ce qu'il avait cherché à fuir. Tous ses souvenirs reviendraient, et il ne pourrait s'empêcher de se souvenir de tout ce qu'il avait vécu avant. Alors il ne voulait pas descendre. Il voulait repartir, loin. Retourner dans sa chambre, sur son lit. Et rester à ne rien faire d'autre qu'à ressasser sa colère et l'injustice de la vie.

    Madame Foster : « Noé. »

    Si la voix était douce et patiente, le jeune adolescent savait qu'il n'obtiendrait pas gain de cause. Pas cette fois. Pour beaucoup de choses, ses parents avaient cédés. Mais pas pour celle-là. Il y en avait eu, des disputes, des soirées où l'adolescent avait tout envoyé valser parce qu'il ne voulait pas retourner à Full Horse. Mais ses parents été restés impassibles. Ils voyaient dans le Haras le dernier recours pour renouer avec leur fils. Mais ce n'était pas gagné.

    Le visage fermé, l'adolescent ouvrit la portière, et descendit de la voiture. D'un geste rapide, il claqua la portière, et s'éloigna sans attendre ses parents. En passant devant eux, il vit l'expression désolée que trahissaient leurs visages, mais il n'en fit rien. Il y a longtemps qu'il avait cessé d'être conciliant avec eux. Peu importe qu'il leur fasse de la peine, ils lui avaient menti. Ils lui avaient caché la vérité, et il leur en voulait. C'était sans doute aussi un moyen de rejeter toute la colère et la frustration engendré par la maladie, mais il se refusait à le reconnaître. Néanmoins, c'était ce que les médecins avançaient face à son nouveau comportement.

    Monsieur et Madame Foster se dirigèrent donc vers les pavillons, tandis que Noé suivait derrière, de loin. Les mains dans les poches de son blouson en cuir, sa tignasse emmêlée et son air renfrogné en disait long sur ce qu'il pensait. Alors qu'ils arrivaient près des marches, une porte s'ouvrit, et une silhouette féminine sortit du pavillon. Une silhouette qu'il aurait aimé ne jamais recroiser. Jess. Celle qui lui avait tant donné lorsqu'il était petit. Sa cousine, qui avait joué le rôle de grande sœur pendant des années. C'était elle qui lui avait fait faire ses premiers pas à cheval. Elle qui lui avait trouvé Obiwan. Elle qui avait construit en parti son monde. Jusqu'à ce que la maladie le détruise. Et désormais, il ne voulais pas le rebâtir. Il avait l'impression d'avoir trop perdu pour recommencer à nouveau.

    Tandis que Jess saluait son oncle et sa tante - qui l'étreignirent chaleureusement - Noé resta à l'écart. Et quand elle se tourna vers lui, il soutînt son regard sans s'avancer. Un regard qui en disait long. Heureusement pour lui, elle ne s'acharna pas, et leur proposa d'aller déposer les affaires de l'adolescent dans sa nouvelle chambre. Le petit groupe s'engagea donc en direction d'un pavillon situé juste à côté. Tandis qu'ils franchissaient la porte d'entrée, et se dirigeaient vers les escaliers, Noé s'arrêta. Personne ne le regardait. Personne ne lui prêtait attention. Alors il tourna les talons, et ressorti. Peu importe Jess et sa nouvelle chambre. Il ne voulait pas de tout ça.

    L'adolescent se mit à déambuler dans le Haras, sans but. Il ne savait pas où il allait, mais celui lui importait peu, du moment qu'il n'avait pas ses proches sur le dos. Il croisa des cavaliers qui la saluèrent, ou bien le regardèrent avec un air interrogatif. Il ne répondit à aucun d'entre eux. Il longea le manège et la carrière. L'un était occupé par un cavalier qui longeait un grand cheval baie. Dans l'autre se tenait un cours. Il aurait pu s'arrêter pour regarder, mais il ne le fit pas. Il n'y avait aucun visage familier, aucune chose à laquelle il tenait. Alors il continua. Il arriva près des paddocks, dans lesquels quelques chevaux prenaient l'air. Il s'approcha de l'un d'entre eux, où paissait un cheval alezan, qui leva la tête à son approche. Mais, avant qu'il ait pu esquisser un pas, le garçon s'était déjà éloigné, indifférent.

    C'est alors qu'il arriva devant les écuries. Un grand bâtiment, aux portes en bois. Sans réfléchir, comme mû par un instinct, il rentra dedans. Les box étaient spacieux, l'allée large et impeccable. Ça et là, des licols ou des brosses traînaient, juchés près de bandes ou d'un tapis. Comme avant. Rien ne semblait avoir changé, si ce n'était le lieux, et les chevaux. Il n'en reconnu aucun. Continuant d'avancer, il arriva au bout de l'allée, et remarqua une jument noire comme l'ébène. Fine, les yeux brillants, elle le regardait. Il ne l'avait vu que quelques fois, pourtant il savait parfaitement qui était cette jument. Et à qui elle appartenait. Blue Dream. C'était la jument de Jess, il en était certain. Serrant les dents, il regarda dans le box d'à côté, où se trouvait un cheval gris, plus trapu et plus grand que sa voisine.

    Quand il se trouvait encore à Full Horse, Obiwan était à chaque fois installé dans un box proche de celui de la jument de sa cousine, pour qu'elle puisse le surveiller et aider Noé en cas de besoin. Derrière lui, il entendit un soufflement, et un cheval s'ébroua. Lentement, Noé se retourna. Dans le box d'en face, il n'y avait pas de cheval, pas de tête qui dépassait. Pourtant, il était occupé. Sa gorge se serra. Il entendit ses parents et Jess entrer dans les écuries - sans doute à sa recherche - mais ne les regarda même pas. Ses yeux étaient rivés sur le box d'en face, d'où émergeait une petite tête aux yeux brillants, et au toupet emmêlé. Noé l'aurait reconnu entre mille. Obiwan. Son poney. Celui qui lui avait tout appris. Le petit Shetland semblait l'avoir reconnu, ou du moins, semblait attentif au petit cavalier qui se trouvait là. Lui qui - quelques instants auparavant - mâchonnait tranquillement son foin avait relevé la tête.

    Noé, le visage figé, se rapprocha du box. Obiwan souffla fort, les naseaux dilatés. L'adolescent fit encore un pas, et s'arrêta. Il n'avait plus d'yeux pour ses parents ou pour Jess, ni pour les autres chevaux. Il en avait seulement pour le shetland, qui le fixait aussi, les oreilles pointées en avant, comme s'il attendait quelque chose. Comme rien ne se passait, le petit poney tapa alors dans la porte de son box, comme pour signifier qu'il s'impatientait. S'en fut trop pour Noé, qui tourna les talons, et s'éloigna en courant. Après tant de mois où son cavalier avait été absent, Obiwan l'avait reconnu. Il l'avait reconnu, comme s'il l'attendait depuis toujours. Comme s'il ne s'était jamais rien passé.

       

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