• Comme un Boomerang

    Genre : RP

    Nom : Comme un Boomerang

    Personnage : Myosotis

    Contexte : Il est temps pour Myosotis de faire un choix concernant Zarys. Le chasser, ou le choisir.

       

     Une mer azur. Un ciel sombre. Une légère brise, à peine perceptible. C'était là ce qui entourait Myosotis. La jeune louve contemplait l'océan, perdue dans ses pensées. Elle ne délaissait pas sa Meute, loin de là, elle prenait simplement ses distances le temps de réfléchir. Car sa dernière rencontre avec Zarys l'avait bouleversé au plus haut point. D'une part parce que la colère et la rage qu'elle avait emmagasiné pendant si longtemps - contre elle, pour avoir chassé Zarys, et contre le solitaire - avaient laissé place, en un instant, à une sérénité si profonde que Myosotis en était encore troublé. Et d'autre part parce qu'elle comprenait bien qu'elle devait faire un choix, désormais.

    Ils ne pouvaient continuer de la sorte, à se croiser, à se confronter, à s'unir. Ce n'était pas possible. Il la détournait de son devoir. Elle le troublait et lui faisait oublier sa vie de solitaire. Ce n'était pas leurs habitudes à tout deux. Être réunis les changeait. Tous les deux. Or, à chaque nouvelle rencontre, cette relation si particulière qu'ils avaient évoluait. Elle l'avait tout d'abord épargné, sans se soucier plus de lui. Puis elle l'avait revu, sur la Montagne, après avoir tant réfléchi à son sujet. Et elle l'avait chassé. Loin d'elle. Elle avait fuit, incapable d'assumer ses sentiments. Mais il avait persévéré. A moins que ce fut une coïncidence.

    La jeune alpha se demandait donc quel serait la prochaine étape. Et en y réfléchissant bien, elle avait vite compris que ce serait la dernière avant une toute nouvelle relation. Deux choix s'offraient à elle. Pas un de plus. Et chacun d'eux impliquait un tas de bouleversement. Le premier semblait être le plus commun. Chassez Zarys, une bonne fois pour toute, et ne plus jamais lui adresser la parole ni penser à lui. Le tuer s'il fallait, pour oublier. Le second choix était bien plus délicat. Car Myosotis ne supporterait pas de voir Zarys s'éloigner. Elle avait mis beaucoup de temps et la chose avait été extrêmement difficile, mais elle avait compris. La jeune louve avait compris qu'elle aimait Zarys. D'un Amour différent de celui qu'elle avait toujours porté jusque là.

    Dire qu'elle était amoureuse ne lui plaisait pas. Ce n'était pas une amourette sans conséquence. Non, c'était bien plus profond que cela. Chacun d'eux n'avait d'égal que l'autre. Ils se ressemblaient tellement. Physiquement comme moralement. Ils avaient la même vision des choses. Les mêmes ambitions. La même vision de la vie. Myosotis s'était toujours estimé dans les meilleurs guerriers d'ici, elle avait toujours pensé avoir une vision différente du monde, propre à elle même. Mais Zarys lui faisait découvrir que ce n'était pas vrai. C'est pourquoi leur relation était si difficile. Parce que la jeune femelle n'avait jamais été du genre à accepter la défaite, la remise en cause de par son côté orgueilleux et ambitieux. Mais aussi parce que son côté un peu caché, celui qui avait été voilé par Aloe, réclamait ce bonheur que Zarys promettait.

    Aussi, quand elle le vit apparaître, elle resta immobile. Il tombait toujours au bon moment, ou presque. Le savait-il ? L'avait-il suivit ? Ou était-ce encore une pure coïncidence ? Difficile à dire. Il ne l'avait toujours pas vu. Pourtant, son Pelage unique tranchait bien avec le paysage, maintenant que la neige commençait à fondre. Myosotis aurait pu s'en aller sans qu'il ne s’aperçoive de rien, et remettre son choix à plus tard. Mais repoussez les choses ne servait à rien. Il était temps de choisir. Il était temps de terminer une page, ou bien d'en commencer une autre. Alors, sa voix s'éleva. Claire et profonde. Pleine d'une sérénité retrouvée :

    « Qu'attends-tu de Moi, Zarys ? »

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    « Ce que je veux, Myosotis... »

    Ce qu'il voulait. Ce n'était pas rien.

    « Ce que je souhaite, c'est d'appartenir à ta Meute. Il est temps pour moi de tourner la page sur ma Solitude... Il y a tant de choses que j'ai appris à tes cotés. Mais tu m'as fait découvrir l'importance d'une meute soudée. Je veux vous aider. Je veux T'aider. »

    Myosotis ne bougea pas. Combien de fois avait-elle songé à cette possibilité ? C'était à la fois l'idéal et le pire. L'idéal parce qu'elle aimait Zarys, et qu'ainsi, elle l'aurait à ses côtés tous les jours. Le pire parce qu'une fois dans sa Meute, elle ne pourrait plus le chasser ni l'éliminer sans une raison valable.

    Extérieurement, elle était de glace. Intérieurement, c'était la tempête. Que voulait-elle vraiment ? Elle n'avait pas de juste milieu. C'était un extrême ou l'autre. Rien d'autre. Et alors même que, l'instant d'avant, elle se sentait en mesure de prendre une décision, la jeune louve ne s'en sentait désormais plus capable. Elle n'avait pas peur, non, loin de là. Elle ne savait pas. Pour la première fois de sa courte vie, elle ne savait pas ce qu'elle voulait. Petite, elle avait voulu être la meilleure. Puis elle avait voulu être Alpha. Mais désormais, que voulait-elle ? Sa voix était impassible, ne trahissant rien de ses sentiments.

    « Tu veux m'aider, Zarys ? Mais de quelle manière ? Comment pourrais-tu. Tu ne connais rien de Moi, Zarys, pas plus que je ne te connais. Tu sais que Toi et Moi sommes pareil, mais que sais-tu d'autre de mon passé ? De ma vie ? Tu ne sais rien, Zarys, à part ce que j'ai bien voulu te dire. Alors comment pourrais-tu m'aider ? »

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    « Je sais. Nous n'étions que deux inconnus il y a peu de temps. Je juge pas les loups par leur passé. Mais par leurs actions. Leurs motivations, leurs objectifs. Connaitre ses alliés est certes capital, mais si je peux compter sur mes camarades, c'est le plus important. Les détails importants comme leur passé sera raconté en temps voulu. C'est tout ce qui m'importe... Une vie ne se réduit pas à ressasser le passé, à le raconter, mais à écrire l'avenir. Tout le monde change avec le temps, et le passé n'est pas la manière la plus fiable de connaitre quelqu'un. Aider à le comprendre, certes. Mais pas à le connaitre. »

    Ressasser le passé ne forgeait pas un loup, mais cela influait. Beaucoup. Peut-être trop. Écrire l'avenir. C'était ce qu'Alaska avait toujours dit. Écrire l'Histoire, tourner les pages, bâtir son Destin. Peut-on connaître un loup sans connaitre son passé ? Cela paraissait peu probable aux yeux de Myosotis. Zarys fit une longue pause, ses yeux rivées sur Myosotis. Mais celle-ci était impassible. Elle était en train d'écrire son Histoire. Ils traçaient leur Destin. et ce n'était pas un choix facile.

    «Tu ne me connais pas plus que je ne te connais, mais pourtant, tu m'as énormément aidé depuis notre première rencontre. Aidé à retrouver mes instincts de loup du Kô. Aidé à en apprendre plus sur moi-même, à me découvrir. A voir que je ne suis pas qu'un vagabond miséreux. Que je peux être utile. Je veux t'aider à mon tour. A réunir les Forts sous une même bannière. A les aider à se trouver. T'aider à te trouver. Quoique tu dises. Au moins veiller sur ta meute et Toi.»

    Myosotis ferma les yeux, dissimulant le regard Arc-en-Ciel du solitaire. Chaque pas qu'ils faisaient côté à côté lui montrait à quel point ils étaient proche, sans toutefois lui confirmer ce qu'elle devait faire. Par instant, il lui semblait totalement différent, bien loin d'elle, sans aucun point commun, et chaque mot qu'il énonçait, chaque geste qu'il faisait contredisait ces différences. Il voulait l'aider à se trouver. Comment pouvait-il, alors qu'elle-même en était incapable ?

    Chaque jour lui rappelait ce qu'elle avait fait, ce qu'elle avait brisé, ce qu'elle ne pourrait jamais recoller. Elle était fière et forte, mais pas totalement heureuse. Elle regrettait son enfance, cette innocence perdue. Elle regrettait Alaska et Whitefang, Kilio, Aloe et Imalys. Elle pleurait ses instants perdus à jamais, par l'ombre d'une rancœur levé au grand jour. Par sa faute, sa famille, ce qu'elle avait toujours connu jusque-là, était brisée et déchirée. Sa mère était morte en essayant de tuer sa demi-soeur. Elle avait détrôné son père et chassé son frère et sa soeur. Son second frère, aîné de la porté, était mort en tombant d'une falaise. Il ne lui restait que Reiko. Reiko qui n'était plus que l'ombre de lui-même. Autant dire personne. Il ne lui restait absolument personne. Elle aimait sa Meute comme elle l'avait toujours aimé, mais c'était différent. Parce que face à cette meute, elle ne pouvait se permettre d'être faible. Elle était le roc qui les maintenait unit.

    Et Zarys représentait un nouvel espoir. Espoir de ne plus être seule, d'avoir quelqu'un avait qui porter un si lourd fardeau. Mais c'était contraire à ce qu'elle avait toujours appris. Être loyale à sa Meute, rechercher le meilleur pour elle. Et Zarys n'était pas forcément le meilleur pour les Shadows. Parce qu'il détournerait l'attention de Myosotis. Parce qu'il la rendrait vulnérable. Et pourtant. C'était ce qu'avait fait Alaska. Choisir un solitaire comme Compagnon, envers et contre tous. Briser les préjugés, et tracer un nouvel avenir. Ecrire une nouvelle page, une nouvelle histoire qui amènerait les Shadows à leur apogée.

    Et elle, Myosotis, fille d'Alaska, était-elle capable de rendre à cette Meute si affaiblie cette grandeur passée ? Tant de sentiments se bousculaient en elle. Comme deux personnalité. L'orgeuil et l'Ambition dont elle avait toujours fait preuve, trop fière pour accepter de l'aide, et le désir de ne plus être seule, l'Espoir. Mais elle n'arrivait pas à franchir le pas. Car une fois le choix fait, il lui serait impossible de retourner en arrière. Ses yeux brillaient d'un éclat de douceur et sa voix était calme et profonde quand elle parla de nouveau, baissant le regard vers le sol.

    « Sais-tu seulement ce que tu me demandes, Zarys ? Tu veux rejoindre ma Meute. Tu veux m'aider. Mais tu ne me laisses que deux choix. Te choisir, ou te chasser. Et choisir l'un est aussi difficile que de choisir l'autre. »

    Relevant doucement la tête, une lueur triste dans les yeux, elle continua d'une voix pleine de regrets.

    « Tu ne me connais que peu, Zarys, et tu ne sais pas de quoi je suis capable. J'ai brisé bien des choses. Je ne suis pas toujours celle que tu peux voir. J'ai deux facettes, Zarys. Et l'une d'elle me rend dangereuse. Je suis responsable de ma Meute. Je me dois d'être forte et fière. Et te choisir me rendrais vulnérable. »


    Son ton était comme désolé, comme si elle s'excusait. Si elle ne le choisissais pas, elle le chasserait, parce qu'elle n'avait pas d'autre choix. Il ne pourrait rester ici.

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    Pourquoi tout devait être aussi difficile ? Il ne comprenait pas. Il en était incapable, rongé par son désir. Pourtant, Myosotis, bien qu'elle aussi profondément troublé, ne perdait pas le fil de son raisonnement et de ce qui faisait d'elle une Alpha.

    «J'en sais plus sur Toi et l'histoire du Kô que tu ne le penses. J'étais là lorsque les Shadows se sont séparés. J'étais là à la cérémonie de ta Mère.  Myosotis, ne me sous-estimes pas. Je suis robuste, et s'il est vrai que je n'ai pas encore vu de quoi tu étais capable, j'ai déjà survécu à la Vie Elle-même, et ce en étant encore sous ma mère.  Et jamais je ne te laisserai vulnérable. Jamais je ne laisserai les autres te faire du mal. Jamais je ne laisserai les autres te faire du mal. Jamais je ne te laisserai tomber. Je te protègerai envers tous et contre tous, quitte à le payer de ma vie... Myosotis... PLus que n'importe qui, je veux que tu accomplices ton Destin. Que tu sois heureuse. Parce que... Tu comptes énormément pour Moi...»

    La louve de neige laboura le sol de ses griffes. Se levant d'un bond, elle se mit à tourner en rond. Elle rageait de devoir prendre une telle décision. Pour une fois, elle aurait préféré laisser la responsabilité à quelqu'un d'autre. Mais ce n'était même pas à cause de son statut d'Alpha qu'elle avait à choisir. C'était à cause de sa nature. Parce qu'elle était une louve. Parce que beaucoup de louves trouvaient un compagnon. Parce qu'elle avait tant à découvrir, mais aussi tant à perdre !

    Une fois encore, Zarys se retrouvait entre deux eaux. D'un côté, elle le haïssait parce qu'il la troublait, parce qu'il la laissait dans un dilemme qu'elle n'arrivait pas à résoudre. Une situation qui lui laissait un goût d'échec, car elle ne maîtrisait presque rien. Mais d'un autre côté, Zarys, plus qu'aucune autre ne le serait jamais, était sa moitié. Aussi impulsif et vif qu'elle, aussi ambitieux et fier, aussi éprouvé par la vie qu'elle l'était. Un rien les séparait. Il était sa version masculine. Son Moi mâle. Et elle ne pouvait le nier, parce que chaque instant le lui rappelait.

    D'un violent coup de patte, elle envoya valser une poignée de coquillage en grognant. Elle ne voulait pas choisir. Elle en était incapable. Et le calme qu'elle avait auparavant réussit à conserver était désormais bien loin, et avait laissé place à une fureur sans pareille. D'une voix pleine de colère et de regrets, elle cria :

    « Ouvre les yeux, Zarys ! Je suis capable de me défendre seule, et aucun loup n'est en mesure de me blesser physiquement si facilement ! Mais Tu me rends vulnérable moralement, ne comprends-tu pas ?! Si je décide de te choisir, alors je deviendrai vulnérable car tu seras toujours présent dans mes pensées, et je serai incapable de faire le vide ! »

    La calme et impassible Myosotis s'était transformé en louve dangereusement puissante. Auparavant, elle ne craignait rien ni personne, et ne redoutait rien. Mais si elle venait à choisir Zarys, le simple fait de le perdre lui deviendrai insupportable, et alors elle aurait peur de quelque chose. Peur d'une seule chose, mais peur. Peur de le perdre.

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    « Depuis quand l’avis et l’opinion des autres conditionnent-elles tes décisions personnelles, Myosotis ? Crois-tu si peu en Toi pour redouter de devenir vulnérable ? Crois-tu que ta Mère s’est posée les mêmes questions, lorsqu’elle avait rencontré Whitefang ? Essaye d’imaginer quelles furent ses pensées avant de l’intégrer dans sa Meute, et peut-être auras-tu Toi même des éléments de réponses. Je ne veux pas te poser de soucis, Myosotis. Je veux juste te rendre service, et te protéger. »

    Myosotis gronda de plus belle. Quel imbécile ! Etait-il donc incapable de comprendre ? Lorsque qu'elle croisa de nouveau son regard, ses yeux améthystes trahissaient une rage et une douleur incomparable. Les muscles tendus, les crocs dévoilés, l'Alpha des Shadows rétorqua vivement :

    « Es-tu si ignorant que ça, Zarys ?! Je ne crains pas de devenir vulnérable, ma volonté ne vacillera jamais, mais n'as-tu jamais aimé ? N'as-tu jamais ressenti de l'affection pour quelqu'un ? »

    N'avait-il pas de frères et sœurs ? Pas d'amis ? Pas de parents ? C'était impossible ! Il avait déjà forcément aimé. Ne serait-ce qu'une fois. Mais peut-être son cœur était-il trop gelé pour se souvenir. Comme Alaska. Lorsqu'elle songea à sa mère, et à la mention que le solitaire en avait fait, Myosotis ferma les yeux.

    Le vide qu'elle avait provoqué ne se comblait pas. Il avait tout fait basculer. La jeune louve ne savait plus vraiment où elle en était. Elle ne pouvait revenir sur ce qu'elle avait fait, mais avancer et reprendre son chemin était plus difficile qu'elle ne l'aurait pensé. Et tout cela à cause d'un seul loup. Comment sa mère avait-elle su que Whitefang était le bon ? Celui qu'il lui fallait ? Quoi qu'il en soit, il n'avait pas à l'utiliser pour faire pencher la balance. Myosotis ne le permettrait pas.

    La tête haute, les yeux fermées, Myosotis était immobile. Une larme roula sur sa joue, preuve de la blessure encore douloureuse qu'elle peinait à guérir. Lorsqu'elle rouvrit les yeux, toute trace de colère avait disparut, laissant place à une profonde incertitude. Son changement de comportement était surprenant. Jeune, elle mettait des heures à apaiser sa colère et sa rancune, et désormais, elle passait de la colère à l'apaisement en quelques secondes.

    Myosotis grandissait. Elle grandissait, et ça faisait mal. C'était douloureux. Difficile. Mais elle grandissait. Parce que chacun, un jour, devait affronter ses craintes, remettre en jeu tout ce qu'il avait toujours connu. Parce que chacun était amené à faire un choix qui changerait le cours de sa vie. Elle n'aurait jamais pensé que le sien viendrait si tôt. Et qu'il serait si difficile.

    De nouveau immobile, figée, elle continua d'une voix calme et profonde :

    « N'as-tu jamais aimé, Zarys ? Si je te choisis, quoi que je fasse, je craindrais pour Toi. Je craindrais que tu disparaisse. Qu'il t'arrive quelque chose. Et j'aurais beau avoir toute la confiance du monde, je ne pourrais cesser d'avoir peur pour Toi.

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    Petit à petit, la carapace s'émietta, s'effrita jusqu'à se briser. Il se laissa tomber au sol, une larme roulant sur sa joue.

    « J’avais une famille… Des frères, et des sœurs qui m’ont été enlevé alors qu’ils venaient d’ouvrir les yeux et n’avait pas eu le temps de constater à quel point ce monde était cruel. Nous n’étions que deux survivants à cette attaque. Mon plus jeune frère, le favori. Notre mère était arrivée à temps, et nous avait sauvé. Nous avions été blessés, mais nous étions bien vivants. J’avait tenté de les protéger, je te le promets… Mais face à la renarde, je n’ai pu faire qu’un mince rempart qui  fut balayé par un simple revers de patte… Je l’ai vu tuer mes frères, dévorer ses sœurs, détruire tout ce que j’avais. Mais le plus  jeune, le plus petit, j’avais réussi à le cacher… Il a prit un coup de patte perdu, mais ce fut sa seule blessure. Je l’avais coincé contre le mur, le cachant. J’étais le plus gros, l’ainé… Et le seul que je pus protéger, le seul qui survécu fut Calyr... »

    Myosotis resta de marbre. Comme elle comprenait sa peine. Mais elle ne dit rien, le laissant continuer. Lorsqu'on rouvrait une blessure, il fallait aller jusqu'au bout. C'était mieux ainsi. Une larme roula encore.

    « Quand ma mère est revenue, elle a tué le danger. Elle nous à trouvé, Calyr et moi, dans un piteux état. Elle s’est occupé de nous toute la nuit. Toute la nuit, elle et moi nous étions occupé de mon frère, le réchauffant du mieux que nous pouvions. Mais, le lendemain, Calyr était mort. Froid et immobile comme la glace, il avait succombé au seul coup de patte qu’il avait reçu. Ma mère l’a emporté. Elle n’est jamais revenue. J’ai grandi seul. Les loups que j’ai réellement aimé sont rares. Calyr pour son innocence. Mad pour l’avoir apprit à survivre. Alaska pour m’avoir donné un modèle de mère, un passé sur le quel me reposer...Toi, pour m’avoir donné un futur sur lequel avancer…»

    C'était comme un coup de poignard dans le poitrail. Comme une fissure cachée qui se révélait au grand jour. Il était le frère qu'elle n'avait jamais eu. Peut-être était-il comme Kilio, qui avait bien caché son jeu, jusqu'à ce qu'il lâche prise du haut de la falaise. Peut-être était-il comme Reiko, qui avait promis de la soutenir et de l'aider. Promis d'être toujours là. Et qui était parti une nuit, sans rien dire. Il avait fuit. Il l'avait laissé seule. Et désormais, Aloe et Imalys étaient loin, eux aussi. D'une fratrie de cinq, elle se retrouvait seule, en partie par sa faute. Et elle n'avait plus ni mère, ni père. Au fond, elle n'avait plus rien. Rien d'autre que Lui.

    Cette blessure qu'elle découvrait, caché depuis toujours, la rendait muette. Jamais elle n'avait réalisé. Réalisé qu'elle n'avait plus personne. Elle avait toujours cru avoir son père ou sa mère à ses côtés, puis au moins Reiko pour la soutenir. Sa meute, aussi. Mais non, rien de tout cela. Elle avait cru pouvoir s'en sortir seule, sans personne, solitaire et fière. Mais Myosotis se rendait compte qu'elle en était incapable. Incapable de continuer comme elle l'avait toujours fait.

    Immobile, figée comme une statue de glace, sa fourrure blanche étincelante, elle lâcha prise. Et les larmes roulèrent sur ses joues. Encore et encore. Silencieusement. Ni lui ni elle ne parlèrent. Car chacun prenait conscience d'une blessure profondément enfouie. C'était douloureux. Affreusement douloureux. Mais ils devaient faire face. Ensemble. Se relever après cette chute implacable. Tenir tête au Destin.

    La mâchoire légèrement entrouverte, tremblante, Myosotis posa son regard sur Zarys. Un regard améthyste vide de toute colère et de toute haine. Un regard plein de souffrance, mais aussi d'espoir. Oui, elle l'aimait. Il était sa moitié, celle qu'elle avait toujours souhaiter trouvé. Ils étaient deux Titans, liés par une même rage de vivre. Et rien ne pourraient jamais les changer. Pas tant qu'ils seraient ensemble.

    Mais Myosotis ne parla pas. Elle avait tant à dire, et en même temps si peu. C'était si simple, et si compliqué. Alors, elle se redressa, la tête haute, et abaissa ses barrières. Repoussant la limite de Zarys, elle les fusionna, jusqu'à  ce qu'elles ne fassent plus qu'un. Deux loups, pour une seule âme. Et elle déversa ses secrets. Ses plus profondes émotions. Ses peurs, sa souffrance, mais aussi sa fierté et son courage. Sa noblesse de coeur et sa loyauté sans faille. Le Kô, par le biais de son pouvoir, lui permettait de déambuler dans l'Esprit de Zarys sans aucune peine. Et elle mêlait sa propre âme à la sienne. Comme une chaleur bienveillante. Elle l'enveloppait doucement, dans un cocon qui lui serait désormais familier, et ce pour toujours.

    C'était intime. Fusionnel. Dangereux. La louve de neige prenait le risque de lui laisser voir ses plus profondes craintes qui, s'il le voulait, pourraient être utilisées contre elle. Mais c'était un risque qu'elle prenait, parce qu'elle faisait désormais toute confiance au solitaire, qui ne le serait plus pour longtemps. Oui, elle l'aimait. Et ce choix qu'elle venait de faire lui enlevait un fardeau énorme, lui permettant de se redresser, et de reprendre son statut d'Alpha. De meneuse.

    Toute peur avait disparut. Toute douleur était de nouveau enfouie. Peut-être ressortirait-elle, un jour. Peut-être demain, peut-être jamais. Mais désormais, tout cela importait peu. Car elle avait choisit Zarys. Alors, d'une voix pleine de tendresse, les yeux brillants de fierté, Myosotis fixa son nouveau compagnon :

    « Je t'aime, Zarys. »

    Peut-être prenait-elle un risque. Peut-être que tout cela n'était qu'une erreur. Mais peu importait, car Zarys en valait la chandelle. Et il partageait désormais sa vie, de manière bien plus intime que la plupart des loups. Il était le seule avec qui Myosotis ait jamais partagé ses souvenirs et ses émotions. Le seul à être en symbiose parfaite avec elle. Ils étaient ordinaires séparément, et pouvaient devenir extraordinaires ensemble.

    ------------------------------

    C'était comme une bulle. Une formidable bulle. Parce que tant qu'il serait là, cette bulle ne se briserait jamais. Ni sur les écueils, ni dans les gouffres. Jamais.

    « Je t’aime, Myosotis. »

    Elle aussi. Plus qu'elle n'avait jamais aimé quelqu'un. Le choix qu'elle venait de faire impliquait tout. Pour des années. Mais cela ne changeait rien, ne ternissait rien du tout. Parce qu'en faisant ce choix, Myosotis avait découvert que les sentiments qu'elle avait depuis toujours pour Zarys étaient en fait bien plus intenses une fois révélé au grand jour.

    Sa chaleur contre elle, son museau contre le sien, tout la confortait dans son choix. Qu'aurait dis Alaska ? Qu'aurait pensé sa mère ? Une fois encore, l'Histoire se répétait. Une Alpha et un solitaire liés à jamais. Mais cette fois-ci, la relation qu'elle aurait avec le grand mâle serait plus intime que jamais. Quiconque parviendrait à essayer de comprendre ne pourrait pas. Parce qu'il y avait en jeu quelque chose d'incompréhensible. D'invisible. D'immatériel. Mais quelque chose de palpable.

    Leurs âmes étaient à jamais unies par le pouvoir de l'Alpha. Myosotis n'avait jamais utilisé son pouvoir dans ce sens. De manière général, elle l'avait peu utilisé, préférant le garder secret pour une nécessité plus grande. Mais en ce jour, elle le découvrait d'une manière différente. Il ne lui servait pas à dévaster un loup, à le détruire, mais au contraire. Il lui servait à le construire. A construire une troisième âme, commune aux deux.

    Elle ne savait ce qu'il adviendrait du jour où ce lien se briserait. Peut-être qu'il ne se passerait rien, mais elle en doutait. Peut-être qu'elle en mourrait. C'était plus probable. Car désormais, elle avait goûté aux joies de l'Amour, et ne comptait pas y renoncer de sitôt. Pour la première fois dans sa vie, elle avait quelqu'un à ses côté qui n'était là que pour elle. Uniquement et entièrement pour elle. Et c'était la plus belle chose qui lui ai jamais été donné.

    Un instant, la louve de neige enfoui son museau dans la fourrure de son nouveau compagnon, s'imprégnant de son odeur, de ce contact si particulier. Quelques secondes seulement, elle replongea dans son enfance. Lorsque tout son univers ne se résumait qu'au mamelle de sa mère, à la fourrure de son père et à ses frères et sœurs. Lorsque son monde n'avait pas encore commencé à s'effriter. Et un instant seulement, elle le regretta.

    Se redressant, elle plongea de nouveau son regard dans celui du Solitaire qui ne l'était désormais plus, et après quelques instants durant lesquels elle se confondit encore plus avec lui, elle détourna le regard, et pris le chemin du retour. Non, pas du retour. C'était un nouveau chemin. Une nouvelle histoire qui s'écrivait. Une nouvelle page. Elle avait enfin réussit à tourner la page. Et désormais, elle n'avait pas besoin de se retourner pour savoir que Zarys la suivrait.

       

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