• Histoire d'Arès - Partie 1

    Genre : Histoire

    Partie : 1

    Personnage : Arès

    Contexte : Début de la vie d'Arès.

       
      Je viens d'un Pays où la neige ne fond jamais. Où la nuit dure la moitié de l'Année. Où le vent glacé souffle sans discontinuer. Ce pays, j'y suis né, et j'y ai passé mon enfance. Sans doute la plus belle partie de ma vie. Mes seuls jours innocents. Heureux. Mon monde ne se résumait alors qu'à cela. Ma mère, Artémis, et sa douce fourrure argentée, mon père, Ysmir, aimant et protecteur, ma soeur, Ushka, pleine d'entrain et de malice, et mon frère, Zarys, fier et ambitieux. Et bien sur, il y avait la Meute. Ces loups gentils et attentifs qui veillaient parfois sur nous. C'était ma famille. Et nous étions heureux.

    J'étais heureux. Je n'étais alors qu'un louveteau. Mes journées se résumaient à de jeux avec les autres louveteaux, et aux heures passées dans la tanière, avec notre mère. Son odeur, sa voix, tout cela me comblait. C'était quelque chose d'unique. Jamais nous ne l'aurions confondue avec une autre, quand bien même nous aurions été aveugles et sourds. Mais ce n'était pas le cas. Et chaque jour, nous pouvions voir sa fourrure claire et ses yeux azur veiller sur nous. Il y avait aussi mon père. Valeureux combattant qui, chaque jour, nous ramenait une proie différente. Sa fourrure sombre et ses yeux sables étaient toujours synonymes de sureté.

    Si la vie c'était résumé à cela, alors nous aurions été les plus heureux. Si chaque loup avait connu cette enfance dorée, alors la Guerre n'aurait pas lieu d'être. Mais la vie ne nous laisse jamais de répit. Et chaque minute de bonheur a un prix. Ce prix, je l'ai découvert alors que j'étais encore jeune. Et je ne l'oublierai pas. Jamais

    C'était un matin. Tôt. Le temps était clément, et le vent ne soufflait pas trop fort. Nous étions fiers de pouvoir enfin accompagner les autres le long de nos Territoires. Si seulement j'avais su. Peut-être que j'aurai pu les sauver. Peut-être que tout serait différent. Mais je ne savais pas. Nous courions, riant aux éclats. Tout était si beau. La neige était douce sous nos pattes. Les gardiens de la Meute nous protégeaient. Nous étions invincibles. Du moins le pensions-nous. Mais ça n'était pas vrai. Rien n'est jamais réellement vrai. Les illusions ne font que bercer nos sens.

    Il y eut ce bruit terrifiant. Qui résonne encore dans mes oreilles. Un bruit sourd, qui ne pouvait qu'être mauvais. Ce n'était pas le chant d'un oiseau ni le brame d'un cerf. Ce n'était pas non plus le grognement d'un loup ou le cri d'un renard. Non, c'était bien pire. C'était quelque chose que nous ne connaissions pas. Le vent avait dissimulé leurs odeurs. Une odeur terrible. Une odeur qu'il me tarde de rencontrer de nouveau. Celles des hommes.

    Une fraction de second après ce bruit assourdissant, le grand mâle beige à ma gauche s'effondra, inerte. Je ne compris pas. Personne ne comprit. Sauf les adultes. En un instant, notre monde bascula. Nous avions toujours pensé que la vie était clémente, que rien ne pourrait jamais nous arriver. Mais nous nous étions trompés. Et nous ne le comprîmes que lorsque les autres gardiens nous écartèrent du chemin, en nous ordonnant de courir. Courir loin. Courir vite. Ne pas se retourner.

    Nous étions obéissants. Les grands avaient toujours raison. Mais tandis que nous courions, Ushka, Zarys, Moi et les autres, notre innocence vacilla. Nous étions en train de comprendre que la sureté n'était qu'une illusion. Qu'il y avait plus dangereux qu'une autre Meute de Loup, où qu'un élan qui chargeait. Mais nous ne savions pas ce qu'ils étaient. Alors nous courrions. Jusqu'à ce que nous n'entendîmes plus aucun bruit. Ce fut seulement à ce moment là que nous nous observâmes. Deux d'entre nous manquaient à l'appel. Et il n'y avait plus de grands avec nous. Nous étions seuls, sans personne pour nous protéger.

    Lorsque nous étions petits, on nous avait toujours enseigné de ne jamais rester seul, de toujours rester avec un adulte. Nous devions faire demi-tour. Nous étions terrifiés, mais notre instinct nous poussait à retourner sur nos pas, et à suivre ce qu'on nous avait appris. Suivant nos traces, nous parvînmes à retrouver notre chemin. Et ce qui nous attendait dépassait de loin ce que nous avions jamais imaginé. Je ne souhaite à aucun loup, qu'il soit jeune ou petit, de découvrir cela.

    La neige était teintée de rouge. Et l'odeur qui flottait dans l'air nous fit plaquer la queue entre nos pattes. Nous ne l'avions rencontré que quelques fois, lorsque qu'un ancien rejoignait nos Ancêtres. Et alors, la Meute pleurait en silence. Nous n'avions jamais réellement compris pourquoi. Nous pensions naïvement que l'Ancien ne faisait que dormir, et qu'il se réveillerait plus tard. Nous n'avions jamais prêté attention au fait qu'il ne revenait jamais. Nous étions jeunes.

    Je me souviens de cette peur glacée qui m'étreignit le poitrail. De ce frissonnement qui me parcourut l'échine. Aujourd'hui encore, ce souvenir me hante. Il n'y avait plus de bruit. Les oiseaux ne chantaient pas. Et aucun loup n'était visible. Alors nous avançâmes. Et nous vîmes le grand loupe beige, le premier à être tombé, étendu sur le sol. Quand nous l'appelâmes, il ne réagit pas. Et nous comprîmes.

    Il n'y a qu'un pas entre le petit et l'adulte. Et ce pas, nous venions de le franchir. Les petits étaient innocents. Et rien n'étaient grave. Mais nous avions compris que le grand mâle beige ne dormait pas, et qu'il ne reviendrait pas, pas plus que les autres. Nous pûmes alors mettre un nom sur ce que nous n'avions jamais compris. La mort. Tous ces loups que nous avions regardé, patient, tandis que la Meute pleuraient. Ils étaient morts. Et ils ne reviendraient jamais.

    Nous n'avions pas parlé. Nous ne nous étions pas regardé. Mais chacun avait compris. Le grand mâle, immobile, était la preuve que nous n'étions plus des enfants. Et alors les larmes se mirent à couler. Parce que nous étions terrifiés. Mais aussi parce que nous avions compris que notre vie venait de basculer. Et parce que nous avions peur de ce que nous allions découvrir.

    Faisant fi du danger, chacun se mit à courir, appelant désespérément ses parents, son frère, son oncle. Mais personne ne répondit. Pas un seul loup. Il nous semblait inimaginable que tous aient disparus. Ils devaient être plus loin en train de nous chercher. Pourtant, au fur et à mesure que nous marchions, je compris qu'une fois encore, nous avions faux. Il y avait bien des choses que nous ne savions pas. Mais désormais, une chose était claire. Rien n'était impossible. Pas même le fait que tous aient été touché.

    Je m'étais toujours promis d'être courageux et fier, comme mon père. De ne jamais trembler. De ne jamais avoir peur. Mais ce jour-là, tout cela se brisa, et tandis que j'appelais, les larmes roulaient de plus belles sur mes joues, et je tremblais de tout mon corps. Et ce que je vis ne fit qu'intensifier ma peur. Un pelage de nacre, au coin d'un buisson. Un pelage si familier que je su immédiatement. Je courus vers ma mère, l'appelant encore et encore. Lui demandant de se réveiller. Mais la mort fait bien son travail, et ne laisse aucune chance. Elle prend, mais ne redonne jamais.

    Et tandis que mon Monde s'écroulait peu à peu, je compris pourquoi les grands craignaient la mort. Parce qu'elle était affreusement douloureuse, et parce qu'elle laissait une blessure béante. Un vide impossible à combler. Une cicatrice à jamais douloureuse. Quand je compris que ma mère ne reviendrait pas, je me mis à la recherche de mon père. Ce fut difficile de l'abandonner là. Ce fut la chose la plus dure que j'eus jamais à faire.

    Je finis pas trouver le corps sombre de mon père, couché au pied d'un sapin. J'eus un regain d'espoir en voyant ses yeux couleurs sables. Il n'était pas mort. Nous n'étions plus seuls. Ils était encore là pour nous. Il était invincible. Mais une fois encore je me trompais. Et ce fut la marre de sang sous son flanc qui me le fit comprendre. Il n'était pas plus invincible que les autres. Personne ne l'était.

    Je pleurais, le suppliais de ne pas partir, de rester avec nous, pensant naïvement qu'il pourrait choisir. Mais il ne répondit pas. Il me parla. J'étais trop terrifié pour comprendre le sens de ses paroles. Mais je m'en souviens encore. Et lorsqu'il se tut, je le suppliais de parler encore. Je voulais entendre sa voix. Mais je ne pu rien faire lorsqu'il ferma les yeux. J'eus beau le pousser, me blottir contre lui, il ne se réveilla pas non plus.

    Alors je pleurai. Mes parents disparus. Ma Meute décimée. Mon enfance à jamais révoquée. Je poussais mon premier hurlement de douleur, de chagrin. J'appelais encore et encore, suppliant, dans l'espoir qu'ils reviendraient. Mais il ne revinrent jamais. Ils n'étaient plus, et ne le seraient jamais plus. Je ne savais pas où était Ushka, ni où était Zarys. Je ne savais pas où était les autres. Mais tout cela n'avait plus d'importance. Le trou béant qui enserrait ma poitrine me faisait atrocement mal.

    Et lorsque je vis Sedjem, l'Alpha, arriver, ainsi que plusieurs autres loups, je ne les regardai même pas. Je ne voulais pas les voir. Je voulais voir mes parents. Je me fichais du reste. Alors je pleurai et appelai, encore et encore. Et je n'arrêtai pas, pas même quand l'Alpha vînt m'enserrer avec une patte pour essayer de me réconforter. Pas même lorsque je vis Ushka. Que pouvaient-ils faire ? Rien. Absolument rien. J'étais désormais tout seul face à la vie. Je n'étais pas prêt. Et je ne songeai même pas à la douleur d'Ushka. Je ne prêtais attention qu'à la mienne, qui semblait me dévorer.

    J'aurai voulu me blottir contre le corps de ma mère, sentir son corps chaud, m'endormir aussi, mais Sedjem ne me laissa pas le faire. Avec douceur, il me pris par le cou, et m'emmena. Loin, très loin de tout cela. Les autres loups emmenèrent les louveteaux désormais orphelins que nous étions tous. Je n'étais pas le seul à pleurer. En un instant, quelque chose que nous n'avions jamais connu, jamais vu ni jamais sentie, venait de détruire la moindre miettes de notre monde. Je ne revis jamais mes parents, pas plus que Zarys.
       

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :