• Genre : RP

    Nom : Le temps ne cicatrise pas les outrages du temps (Partie 2)

    Personnage : Noé A. Foster

    Contexte : Suite de la partie 1

     

    Un dernier panneau indiquant le haras, à quelques kilomètres de là. Ils arrivaient. Difficile de se réjouir pour Noé, qui aurait sans doute préféré ne jamais remettre les pieds ici. Au fond, peut-être aurait-ce été mieux que le cancer prennent le dessus, et qu'il parte. Il n'aurait pas eu à vivre tout ça. Il en voulait à ses parents et aux médecins. A ses amis, qui faisaient tout pour l'aider. Au monde entier. Tout le monde le prenait pour une petite chose fragile, alors que c'était tout le contraire. Il avait tellement vécu de choses ces dernières années qu'il s'était forgé une carapace indestructible. Inviolable. Du moins, c'était ce qu'il croyait.

    Bientôt, le break ralenti, et tourna dans une allée pavée. Noé ne put qu'observer - impuissant - ce qu'il avait toujours connu. Ça et là, des cavaliers menaient leurs chevaux. Montés ou à pied. En train d'être pansés ou travaillés. Sur la droite, une groupe de chevaux à la crinière rasée évoluaient sur un immense terrain de polo. A gauche, d'élégantes bâtiments semblaient abriter les chambres et les lieux de vie des cavaliers. La moindre parcelle de paysage que Noé observait était dédiée aux chevaux. Un monde dont il avait fait le deuil. L'adolescent n'avait jamais pensé remettre les pieds à Full Horse, tout comme il avait tenté d'oublier Obiwan, Jess, et tous les autres. Mais voila que tout basculait. Il aurait du être content de pouvoir revenir, après tant de mois passés loin du Haras ! Mais non. Il était indifférent. Renfermé. Seul. Comme chaque jour depuis qu'il avait compris.

    Le coude contre la vitre et la tête appuyée sur le poing, il ne bougea pas lorsque son père, après avoir garé la voiture, coupa le moteur. Du coin de l’œil, il le vit se tourner vers lui avec un léger sourire sur le visage. Un instant, il redouta un commentaire de sa part, mais il n'en fut rien. C'était mieux ainsi. Depuis quelques mois, les parents du jeune garçon avaient compris qu'il ne servait à rien d'essayer de le sortir de son enfermement lorsqu'il n'était pas disposé à parler. Autant dire que, dernièrement, ils étaient complètement dépassés, et avaient l'impression de perdre peu à peu leur fils. Ils n'arrivaient plus à le sortir de sa solitude, ni même à percer la carapace qu'il s'était construite. Il avait son monde, et personne n'y était invité.

    Ils descendirent donc de voiture, comme si de rien n'était, et ouvrirent le coffre. Là, quelques bagages s'entassaient : des vêtements, des livres, un ordinateur portable, le strict minimum pour monter à cheval, et quelques autres babioles. Comme l'adolescent avait grandit, il avait fallu investir dans de nouvelles affaires pour son retour au Haras. Mais il n'était pas très coopératif, aussi ses parents avaient-ils acheté le strict minimum en espérant qu'il irait par la suite chercher ce qui lui manquait. Monsieur Foster pris les valises les plus lourdes, tandis que sa femme s'occupa du reste, et ferma le coffre. Comme Noé ne descendait pas, elle l'appela gentiment :

    Madame Foster : « Tu viens, Noé ? »

    L'adolescent ne cilla pas. Il ne tourna même pas la tête, le regard fixé au loin. Il regardait sans voir. Il n'écoutait pas vraiment. Bien sur, il avait entendu. Mais il savait qu'à partir du moment où il descendrait de la voiture, il prendrait de plein fouet ce qu'il avait cherché à fuir. Tous ses souvenirs reviendraient, et il ne pourrait s'empêcher de se souvenir de tout ce qu'il avait vécu avant. Alors il ne voulait pas descendre. Il voulait repartir, loin. Retourner dans sa chambre, sur son lit. Et rester à ne rien faire d'autre qu'à ressasser sa colère et l'injustice de la vie.

    Madame Foster : « Noé. »

    Si la voix était douce et patiente, le jeune adolescent savait qu'il n'obtiendrait pas gain de cause. Pas cette fois. Pour beaucoup de choses, ses parents avaient cédés. Mais pas pour celle-là. Il y en avait eu, des disputes, des soirées où l'adolescent avait tout envoyé valser parce qu'il ne voulait pas retourner à Full Horse. Mais ses parents été restés impassibles. Ils voyaient dans le Haras le dernier recours pour renouer avec leur fils. Mais ce n'était pas gagné.

    Le visage fermé, l'adolescent ouvrit la portière, et descendit de la voiture. D'un geste rapide, il claqua la portière, et s'éloigna sans attendre ses parents. En passant devant eux, il vit l'expression désolée que trahissaient leurs visages, mais il n'en fit rien. Il y a longtemps qu'il avait cessé d'être conciliant avec eux. Peu importe qu'il leur fasse de la peine, ils lui avaient menti. Ils lui avaient caché la vérité, et il leur en voulait. C'était sans doute aussi un moyen de rejeter toute la colère et la frustration engendré par la maladie, mais il se refusait à le reconnaître. Néanmoins, c'était ce que les médecins avançaient face à son nouveau comportement.

    Monsieur et Madame Foster se dirigèrent donc vers les pavillons, tandis que Noé suivait derrière, de loin. Les mains dans les poches de son blouson en cuir, sa tignasse emmêlée et son air renfrogné en disait long sur ce qu'il pensait. Alors qu'ils arrivaient près des marches, une porte s'ouvrit, et une silhouette féminine sortit du pavillon. Une silhouette qu'il aurait aimé ne jamais recroiser. Jess. Celle qui lui avait tant donné lorsqu'il était petit. Sa cousine, qui avait joué le rôle de grande sœur pendant des années. C'était elle qui lui avait fait faire ses premiers pas à cheval. Elle qui lui avait trouvé Obiwan. Elle qui avait construit en parti son monde. Jusqu'à ce que la maladie le détruise. Et désormais, il ne voulais pas le rebâtir. Il avait l'impression d'avoir trop perdu pour recommencer à nouveau.

    Tandis que Jess saluait son oncle et sa tante - qui l'étreignirent chaleureusement - Noé resta à l'écart. Et quand elle se tourna vers lui, il soutînt son regard sans s'avancer. Un regard qui en disait long. Heureusement pour lui, elle ne s'acharna pas, et leur proposa d'aller déposer les affaires de l'adolescent dans sa nouvelle chambre. Le petit groupe s'engagea donc en direction d'un pavillon situé juste à côté. Tandis qu'ils franchissaient la porte d'entrée, et se dirigeaient vers les escaliers, Noé s'arrêta. Personne ne le regardait. Personne ne lui prêtait attention. Alors il tourna les talons, et ressorti. Peu importe Jess et sa nouvelle chambre. Il ne voulait pas de tout ça.

    L'adolescent se mit à déambuler dans le Haras, sans but. Il ne savait pas où il allait, mais celui lui importait peu, du moment qu'il n'avait pas ses proches sur le dos. Il croisa des cavaliers qui la saluèrent, ou bien le regardèrent avec un air interrogatif. Il ne répondit à aucun d'entre eux. Il longea le manège et la carrière. L'un était occupé par un cavalier qui longeait un grand cheval baie. Dans l'autre se tenait un cours. Il aurait pu s'arrêter pour regarder, mais il ne le fit pas. Il n'y avait aucun visage familier, aucune chose à laquelle il tenait. Alors il continua. Il arriva près des paddocks, dans lesquels quelques chevaux prenaient l'air. Il s'approcha de l'un d'entre eux, où paissait un cheval alezan, qui leva la tête à son approche. Mais, avant qu'il ait pu esquisser un pas, le garçon s'était déjà éloigné, indifférent.

    C'est alors qu'il arriva devant les écuries. Un grand bâtiment, aux portes en bois. Sans réfléchir, comme mû par un instinct, il rentra dedans. Les box étaient spacieux, l'allée large et impeccable. Ça et là, des licols ou des brosses traînaient, juchés près de bandes ou d'un tapis. Comme avant. Rien ne semblait avoir changé, si ce n'était le lieux, et les chevaux. Il n'en reconnu aucun. Continuant d'avancer, il arriva au bout de l'allée, et remarqua une jument noire comme l'ébène. Fine, les yeux brillants, elle le regardait. Il ne l'avait vu que quelques fois, pourtant il savait parfaitement qui était cette jument. Et à qui elle appartenait. Blue Dream. C'était la jument de Jess, il en était certain. Serrant les dents, il regarda dans le box d'à côté, où se trouvait un cheval gris, plus trapu et plus grand que sa voisine.

    Quand il se trouvait encore à Full Horse, Obiwan était à chaque fois installé dans un box proche de celui de la jument de sa cousine, pour qu'elle puisse le surveiller et aider Noé en cas de besoin. Derrière lui, il entendit un soufflement, et un cheval s'ébroua. Lentement, Noé se retourna. Dans le box d'en face, il n'y avait pas de cheval, pas de tête qui dépassait. Pourtant, il était occupé. Sa gorge se serra. Il entendit ses parents et Jess entrer dans les écuries - sans doute à sa recherche - mais ne les regarda même pas. Ses yeux étaient rivés sur le box d'en face, d'où émergeait une petite tête aux yeux brillants, et au toupet emmêlé. Noé l'aurait reconnu entre mille. Obiwan. Son poney. Celui qui lui avait tout appris. Le petit Shetland semblait l'avoir reconnu, ou du moins, semblait attentif au petit cavalier qui se trouvait là. Lui qui - quelques instants auparavant - mâchonnait tranquillement son foin avait relevé la tête.

    Noé, le visage figé, se rapprocha du box. Obiwan souffla fort, les naseaux dilatés. L'adolescent fit encore un pas, et s'arrêta. Il n'avait plus d'yeux pour ses parents ou pour Jess, ni pour les autres chevaux. Il en avait seulement pour le shetland, qui le fixait aussi, les oreilles pointées en avant, comme s'il attendait quelque chose. Comme rien ne se passait, le petit poney tapa alors dans la porte de son box, comme pour signifier qu'il s'impatientait. S'en fut trop pour Noé, qui tourna les talons, et s'éloigna en courant. Après tant de mois où son cavalier avait été absent, Obiwan l'avait reconnu. Il l'avait reconnu, comme s'il l'attendait depuis toujours. Comme s'il ne s'était jamais rien passé.

       

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  • Genre : RP

    Nom : Mes condoléances

    Personnage : Héra

    Contexte : Héra rencontre Kumpa, Prince de Prideland, qui a vu tomber Theluji.

     

    Si la neige ne tombait plus, les paysages n'en restaient pas moins immaculés. Ça et là, les congères et les tas de neige formaient un relief bien connu des Nordiques. Eux qui avaient toujours vécu ici ne craignaient pas la neige et le froid. Ils avaient appris à l'apprivoiser. Leurs pelages blancs en étaient la preuve même. Tous les Nordiques, sans exception, avaient cette spécificité morphologique. Mais il y en avait une autre, qu'Héra avait à cœur. C'était la noblesse. Noblesse physique, mais aussi noblesse d'esprit. Des lions sages et réfléchis, voila ce qu'ils étaient. Et c'était en ces termes que la Commandante des Guerriers blancs avait délivré le message de tout un Clan. En ces termes qu'elle avait mis en avant leur souhait de savoir. Et c'était ce pourquoi elle était là.

    Descendue de la Montagne avec deux autres Nordiques, Héra avait le visage fermé. Le temps s'écoulait peu à peu, mais la blessure restait ouverte et désespérément douloureuse. Bras droit de Theluji depuis bien longtemps, elle était à l'image même du Roi, honorable et fière. C'était pourquoi elle ne laissait rien transparaitre de son chagrin. Pourtant, il était difficile de passer outre. Elle n'avait cependant pas le choix. Elle se devait d'avancer, et de guider tout un peuple, jusqu'à ce que le successeur de leur grand Roi soit prêt à prendre sa suite. Alors elle se refermait comme une huitre, ne vivant plus que pour ses compagnons. Nul doute que, si aucune responsabilité n'avait été entre ses pattes, tout aurait été différent.

    Bientôt, ils purent enfin distinguer trois masses au loin. Trois pridelanders. Dont Kumpa, Prince de Prideland. Venu en personne. Héra ne pouvait qu'en être reconnaissante, bien qu'elle en ai fait la demande. Il aurait pu envoyer un autre lion à sa place, mais il avait sans doute jugé que cette discussion était assez importante pour ses déplacer. La tête haute, et la foulée ample, la vieille lionne le rejoignit donc. Il était accompagné de deux compagnons, tout comme elle. Simple précaution, à n'en pas douter. Héra ne représentait certainement pas une menace à ses yeux. Alors, plongeant son regard doré dans celui du jeune prince, elle déclara :

    ─ Salutations, Kumpa. Je te remercie de bien vouloir accéder à ma requête.

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    ─ Accéder à votre requête et vous rencontrer est un honneur, bien que ce soit dans des conditions des plus extrêmes, Régente. Nous sommes tous très émus par ce jour funeste, et au nom des Pridelanders, je présente mes sincères condoléances pour la mort du grand Roi Theluji. Puisse son âme reposer en paix. Que va-t-il se passer, maintenant ?

    Un instant, Héra se perdit dans le faciès du jeune mâle Pridelander. Il était grand et trapu, et semblait avoir toutes les qualités d'un grand prince. Mais il n'en était pas moins responsable de la mort de Theluji. C'était lui qui avait réclamé de l'aide. Lui à qui Theluji avait promis. Sans lui, il était probable que le grand Roi du Nord soit encore en vie. Probable, et pas impossible. La vieille lionne aurait pu bondir sur lui, et ne s'arrêter que lorsqu'il serait réduit au silence ou qu'elle aurait perdu sa seule chance de combler un tant soi peu sa peine. Mais, si noble et honorable qu'elle était, elle n'en fit rien. Prideland n'était pas leur ennemi. Ils en avait un autre, bien plus sombre et ténébreux. Alors, d'une voix grave, la Commandante des Guerriers Blancs déclara :

    ─ Nul doute que la disparition de Theluji laisse un grand vide dans nos cœurs. Je me dois de te dire que je m'étais opposé à son départ, et que je n'ai jamais approuvé sa décision. Si la décision ne lui avait pas appartenu, alors il me semble que nous ne serions pas descendu de notre Royaume.

    Autant pour elle que pour l'intégrité de leur alliance, Héra se devait de dire la vérité à Kumpa. Il devait savoir qu'elle avait toujours désapprouvé, et qu'elle regrettait désormais amèrement de ne pas avoir insisté plus. Toutefois, au fond d'elle, une petite voix clamait qu'elle avait fait tout ce qu'elle avait pu, et que son Roi avait pris sa décision avant même de lui en parler. Ses yeux se fermèrent un instant - l'espace d'une seconde - cachant sa peine et sa douleur face à la perte d'un second père. Elle ne perdit ni son port altier, ni son attitude noble. Jamais. Pas même devant le gouffre qui s'était ouvert autour d'elle. Égale à elle-même, elle parla donc d'une voix sincère :

    ─ Quand bien même notre Roi a payé de sa vie votre demande, notre alliance n'est pas rompue. Les Nordiques n'ont qu'une parole, et tant que notre accord ne sera pas révolu, alors il n'y aura aucune fuite de notre part.

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    Le jeune prince sembla rassuré lorsqu'il compris que l'Alliance des Pridelanders et des Nordiques n'étaient pas révolue, malgré la mort de Theluji. C'était là toute la noblesse des lions du Nord. Certes, ils avaient perdus leur Roi, qui représentait bien plus à leurs yeux, mais ce n'était pas du à une trahison des Pridelanders. Il n'y avait donc aucune dérobade.

    ─ Je comprends votre refus, et... Les événements qui se sont produits étaient bien trop imprévisibles pour réussir à les repousser de manière sûre. Nous, les Pridelanders, veillerons votre Roi lorsque nous récupérerons nos Terres.

    Lorsqu'ils récupèreraient leurs Terres. Qui pouvait prédire une telle chose ? Les Nyeusis avaient le temps de faire bien des choses de la dépouille de leur défunt Roi. C'était quelque chose de difficilement supportable pour la Commandante des Guerriers Blancs que de ne pas pouvoir veiller et honorer convenablement la dépouille de Theluji. Toutefois, elle essayait de se raisonner en se disant qu'elle avait fait tout ce qui était en son possible, et que son ancien Mentor comprendrait. Elle espérait.

    ─ Merci pour avoir accepté de prolonger notre alliance. Sachez que Prideland a avec lui Outland, et quelques Freelanders. Le cas des Nyeusis n'est qu'une question de temps, je vous l'assure.

    Héra détourna un instant le regard, fixant l'horizon. Elle n'était descendu que rarement des Montagnes, veillant sur le Clan à la place de Theluji quand celui-ci s'absentait. Elle n'avait jamais été réellement malheureuse. Parfois triste, parfois en colère, mais Theluji avait toujours su la retenir. Or, maintenant qu'il n'était plus là, elle n'avait plus qu'une mission à accomplir. Faire de Késhia un Roi digne de ce nom. Ensuite, elle pourrait partir, en ayant à l'esprit que les Nordiques auraient à leur tête un autre grand Roi. Mais, si elle voulait assurer la pérennité de son Clan, la vieille lionne ne devait pas se contenter de préparer Késhia. Elle devait aussi détruire les menaces potentielles, pour que le jeune mâle puisse prendre le trône et trouver sa place sans avoir à se préoccuper d'une guerre imminente. C'est pourquoi, reposant son regard sur Kumpa, elle déclara :

    ─ Les Nyeusis œuvrent dans l'ombre. Nul doute qu'ils ne se contenteront pas des seules Terres dont ils viennent s'emparer. Si nous formons des alliances, il y a fort à parier qu'ils font de même.

    Au fond des yeux de la vieille lionne s'allumèrent alors de petites étincelles. Elle entrevoyait enfin une possibilité de venger son Roi. Si la lionne avait toujours été pacifiste et juste, n'usant jamais de son grade, il était temps que les choses changent. Sa voix se fit plus ferme lorsqu'elle continua :

    ─ Si nous voulons les surprendre, il faut frapper maintenant. Plus nous attendons, plus ils se douteront que nous tramons quelque chose. Ils ne s'attendent pas à ce que nous revenions à la charge aussi tôt. Tu dis avoir rallié à votre cause Outland et quelques Freelanders. Nous nous joindrons à vous. Les Nordiques descendront.

    C'était dit d'une manière simple, sans équivoque. Pourtant, cela impliquait quelque chose de bien plus important. Les Nordiques, dans toute l'histoire de la Terre des Lions, n'étaient presque jamais descendus en masse de leurs Montagnes. Mais désormais, les choses allaient changer. Theluji n'était plus là. Il revenait à Héra de prendre les décisions, le temps que Késhia soit prêt. Et la vieille lionne décidait de révéler aux autres la force des Nordiques.

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    ─ Je suppose que votre Roi avait un héritier n'est-ce pas ? Quel est son nom ? Comment est-il ? Il me semble que j'ignore tout de votre hiérarchie, vous m'en voyez désolé.

    S'il ne s'était pas agit du jeune Prince, la question aurait pu prêter à confusion. Pourquoi vouloir connaitre ces informations ? Héra n'était pas le genre de lion naïf, qui s'imaginait qu'il ne s'agissait toujours que de curiosité. Certains lions savaient parfaitement jouer de leurs atouts pour obtenir de précieuses informations qu'ils utilisaient ensuite pour leurs propres ambitions. Quitte à nuire aux autres, peu importait. Chacun pour soi, voila ce qu'était la devise de tels lions. Mais Kumpa n'était pas de cela. Du moins la vieille lionne l'espérait t-elle.

    ─ Theluji est mort sans descendant. L'Héritier qu'il a choisis se nomme Késhia. Il a été recueilli petit, et à toujours fait honneur aux Nordiques. Il marchera sans crainte dans les traces de notre grand Roi.

    Allait-elle trop loin ? Non. De toute manière, il serait facile pour qui voulait de découvrir qui était le nouveau Roi du Nord. Cela se propagerait bientôt jusqu'au fin fond de la terre des lions. La mort de Theluji n'était pas restée inconnue de tous. Ses yeux dorées perçant le regard du mâle qui se tenait face à elle, elle n'en perdait pas moins de sa superbe. Elle était de ceux qui ne pliaient jamais. Pas même devant la mort. D'une voix posée, elle déclara :

    ─ Le Temps nous ait compté. Libre à vous de décider du moment où nous frapperont. Il te suffira alors d'envoyer un lion nous prévenir. Nous seront là en quelques jours. Mais sache que le climat diffère entre nos Terres, et que pour tes lions comme pour les miens, les différences ne font pas bien ménage, et nous ne pourront nous éterniser en bas. Il faudra frapper vite.

     

     

     
       

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  • Genre : RP

    Nom : The King is Dead

    Personnage : Héra

    Contexte : Les Nordiques rendent un dernière hommage à Theluji

     

    C'était un matin, tôt, avant que le soleil ne se lève. La nuit tenait encore la Terre des lions, et tous étaient endormis. Tous, sauf une. Assise, droite et fière, le regard rivé vers l'horizon. Héra. Commandante des Guerriers Blancs. Bras Droit de Theluji. Les nuits s'étaient succédé depuis le départ de la troupe de Nordiques, avec le Roi à leur tête, et le grand Nord devait les voir revenir incessamment sous peu. Quoi qu'il se soit passé. Alors la fidèle lionne avait veillé, jour et nuit. Elle avait observé chaque parcelle de neige à la recherche d'un moindre mouvement. Et plus le temps s'était écoulé, plus son cœur s'était serré. Jusqu'à ce qu'un souffle lui ait indiqué que quelqu'un se trouvait là, derrière. Et alors, Héra avait su. Elle avait su qu'elle ne reverrait pas son Roi. Bien avant qu'une voix s'élève faiblement : « Le Roi est Mort. » Elle ne s'était pas retourné. N'avait pas dit un mot. N'avait même pas cillé. Alors le lion s'en était allé. Et une unique larme avait roulée sur sa joue immaculée.

    La nuit était tombée depuis peu lorsque Héra sorti de la grotte qui servait de repère aux Nordiques. Il n'y avait aucun bruit dehors. Pas d'oiseau qui hululaient, pas de prédateurs en train de tuer sa proie. Rien qu'un silence pesant. Aujourd'hui était un jour bien particulier, que la vieille lionne avait espéré ne jamais voir venir. Mais il était bien là, désormais. Et elle n'avait d'autre choix que de l'affronter, face à face, dans un combat silencieux. Les Nordiques à sa suite, elle s'engagea sur le chemin tortueux qui menait à l'un des pics les plus haut de leur Royaume. Les uns après les autres, les membres du Clan marchaient dans ses pas, sans un bruit. Un oeil extérieur n'aurait su dire ce qu'il se passait, mais un lion né au cœur du Nord pouvait sans peine l'expliquer. Il était temps de veiller le défunt Roi. Et pour être au plus proche de son âme, leurs Ancêtres avaient choisis le Mont Blanc comme lieu de recueillement. Parce qu'il était si haut qu'on aurait parfois pensé qu'il touchait les étoiles, dont certains pensaient qu'elles représentaient le cœur des fidèles guerriers de Jadis.

    La marche avait été longue et harassante depuis leur départ, et ils ne s'étaient arrêtés que pour accorder du repos aux plus fragiles. Mais désormais, ils avaient atteint le sommet, où la neige formait une épaisse couche au sol. Là, Héra conduisit ses guerriers dans un repli caché de la montagne, une sorte de petite carrière où le vent n'emmenait que peu de neige. Tout autour, des rochers s'élevaient, formant comme des remparts rassurants. Ce lieu si particulier n'était connu que des plus âgés. De générations en générations, il était partagé, pour que chaque monarque puisse y être veillé avec honneur. Et ce soir-là, c'était le tour de Theluji. Sans doute l'un des plus honorable Roi que le nord ait connu. Et le seul qui ait su gagner a jamais l'affection la plus profonde de la vieille lionne.

    Le temps que chaque Nordique trouve sa place dans le cercle, Héra s'isole, grimpant sur un rocher escarpé, au bord de la falaise. Là, le vent ébouriffa son pelage, et elle ferma les yeux. Comment allait-elle faire, désormais ? Theluji n'était plus à ses côtés. Et quoi que chacun dise, rien ne serait plus jamais pareil. Il avait représenté tout ce qu'on pouvait imaginer pour elle. Un Père. Un Frère. Un Ami loyal et fidèle qui ne l'avait jamais déçu. Et si elle avait toujours été à son service, il avait toujours été là pour elle. Mais en lâchant son dernier souffle, il avait laissé un grande vide dans le cœur de la vieille nordique. Un manque si immense à combler qu'il ne le serait sans doute jamais. Et maintenant qu'il n'était plus là, c'était à elle de veiller sur les Nordiques - jusqu'à ce que Késhia soit en âge de régner - et elle n'était pas sure d'en être capable.

    Soudain terrifiée à l'idée de ce qui l'attendait, elle frissonna. Si aucune annonce n'avait été faite quant à la mort du Roi, la vérité n'avait pas mis longtemps à être découvert lorsque la Commandante était revenue de son post de guet. Seule et silencieux. Le regard terne et les poils de ses joues humides. Parce que les Nordiques n'avaient jamais vu pleurer leur fidèle commandante, ils avaient tous compris. Si Héra s'était toujours montrée forte et courageuse, la perte de Theluji était un montagne qui lui paraissait impossible à franchir. Elle n'avait cependant pas le choix.

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    Un pelage blanc vînt frotter le sien. Héra n'eut nul besoin de tourner la tête pour savoir qui cela pouvait être. Seul leur futur Roi se permettrait de la rejoindre dans un tel moment. C'était d'ailleurs le seul qu'elle accepterait à ses côtés pour tenter de surmonter un telle épreuve. Il était le seul capable de comprendre l'immensité de son chagrin, parce que Theluji avait été son Mentor autant qu'il avait été celui d'Héra. Tous deux partageaient en secret cette chose là. Ce souvenir-là.

    ─ Ils paieront, n'est ce pas ? Je les ferai payer. Je les tuerai tous. Tous autant qu'ils sont...

    Qui pourrait payer le prix d'un tel chagrin ? Qui serait capable de compenser cette perte ? Personne. Et si la vieille lionne était en mesure de comprendre la réaction du jeune roi, elle savait que la vengeance n'apportait jamais ce qu'on espérait d'elle. Elle n'était qu'un lot de consolation, et pesait bien peu dans la balance. La voix du jeune mâle s'était brisée, et si Héra partageait sa peine, elle ne dit rien. Il n'y avait rien à dire dans de tels moments.

    ─ Nous sommes prêts.

    Sans croiser son regard, le fuyant presque, la vieille lionne acquiesça silencieusement. Et, tandis que Késhia descendait prendre sa place dans le cercle, elle ferma les yeux un instant. Elle avait l'impression que le monde entier reposait sur ses épaules. La disparition de Theluji représentait bien peu pour les Clans lointains, mais pour les Nordiques, c'était une véritable tragédie. Et c'était à elle d'en soutenir le poids. A elle, et à Késhia. A eux deux, ils devaient soutenir tout un peuple, et le faire se relever de sa chute. Le faire avancer. Le faire grandir encore.

    Relevant la tête, Héra se leva lentement. Le pas lourd, et le cœur plus encore, elle redescendit parmi les siens. Son allure était noble et fière, mais son cœur brisé. Ce soir, il serait temps de partager son chagrin avec les autres. Temps de souffler un dernier adieu à leur Grand Roi. Temps de pleurer une dernière fois Theluji. Et elle n'était pas sur d'être prête. Si longtemps qu'elle avait vécu, la vieille lionne aurait aimé avoir quelqu'un à ses côtés ce jour-là. Lorsqu'elle atteignit la sol rocheux, elle observa chacun des nordiques présents. Du plus jeune au plus vieux, tous étaient silencieux, les yeux rivés vers elle. Alors, elle repris sa marche, et rejoignit sa place dans le cercle. Là, elle s'avança de quelques pas, puis s'arrêta.

    ─ Il est temps pour nous de veiller notre Grand Roi.

    Si sa posture noble et son port altier ne trahissait rien, la voix de la vieille lionne était vacillante face à son chagrin. Elle n'avait guère le cœur à tourner de long discours, aussi allait-elle droit au but. Chacun ici serait en mesure de comprendre.

    ─ Comme chacun le sait, notre Roi a disparut. Theluji n'est plus. Et chacun, ici, a le droit de savoir. Le droit de savoir pourquoi, et le droit de savoir comment.

    Peu à peu, Héra sentit sa voix se raffermir. Oui, leur Roi était mort, mais pour une cause honorable. Si leur tristesse était immense, leur fierté ne pouvait qu'être présente devant le sacrifice de leur Roi. Le Grand Roi du nord était mort en Héro. Détaillant chaque nordique de ses yeux dorés, Héra repris :

    ─ Cela faisait longtemps que les Royaumes d'en bas n'étaient plus en paix. Et si les tensions avaient autrefois su être apaisées, elles ne purent l'être cette fois-ci. C'est pourquoi, lorsque certains Clans sont venus demander de l'aide à notre Peuple, Theluji a donné sa parole. Jadis, nous avions su repousser les Nyeusis et leurs alliés. Et nous l'avons fait encore une fois. Mais cela avait un prix. Theluji l'a payé de sa vie. Il a refusé de courber l'échine face à son destin, et il a tenu sa promesse jusqu'au bout. Il est mort en honorant ses promesses, et nul ne pourra jamais lui reprocher d'être un lâche.

    Un infime mouvement au coin des babines d'Héra fut perceptible lorsqu'elle repensa à Theluji, le regard fier, contemplant ses Terres. Oui, il avait de quoi être honoré. Il était plus brave et plus noble que bien des lions. Il avait su imposer le respect et la noblesse de cœur des Nordiques en s'inscrivant dans l'histoire. Et il n'appartenait qu'à eux de continuer à transmettre son Histoire et d'honorer sa mémoire. Elle se souvenait de ce jour où le grand lion blanc l'avait élevé. Il lui avait fait confiance. Il avait construit sa vie, et elle ne pourrait jamais l'oublier. Une larme coula sur sa joue lorsqu'elle termina :

    ─ Theluji était un grand Roi. Il est mort pour protéger les siens. Il faisait confiance à chacun d'entre nous. A nous de continuer ce qu'il avait commencé.

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     Et tandis que les larmes roulaient silencieusement sur les joues d'Héra, comme de certains Nordiques, le vent hurlait. Comme s'il avait emporté les pensées de chacun, la peur et le regret du cœur de chaque lion. Héra se plaisait à penser qu'il porterait leurs paroles jusqu'à Theluji, qui se trouvait désormais dans un endroit inaccessible pour eux. Chacun des Nordiques finirait par le rejoindre, mais l'heure n'était pas venue. Pas encore. Et tandis que la vieille lionne tentait de se consoler à cette idée, Késhia parla d'une voix calme :

    ─ Un renouveau approche pour notre clan. Les temps qui viennent et qui sont déjà à nos portes seront durs, mais notre clan fera face, comme il l'a toujours fait. Vous ferez face. Nous sommes les félins blancs, les lions dans les montagnes. Nous tombons, mais nous nous relevons, toujours plus forts. Je crois en vous.

    Il était sage. Sage, et plein d'honneur. Il avait su toucher chaque Nordique en plein coeur. Gagner la confiance de chacun ne serait qu'une question de temps. Et personne ne pourrait douter de lui, une fois sa légitimité et sa valeur révélées aux yeux de tous. Elle le révèlerait aux autres. Nul n'était mieux placé que lui pour succéder à Theluji, Héra en était désormais certaine. Le temps le montrerait à ceux qui en doutaient. Chacun leur tour, les Nordiques qui le voulaient prirent la parole pour adresser un dernier hommage à leur défunt Roi. Et nul ne su retenir son émotion et sa peine face à la perte d'un tel emblème. Pas même la commandante aguerrie.

    Et, lorsqu'enfin chacun eut terminé, et que le silence se mit à régner en maître, alors Héra se leva. L'Aube n'était désormais plus très loin, mais elle ne s'en irait pas sans que les premiers rayons du soleil aient fit scintiller la glace. Chacun était désormais libre de faire ce qu'il souhaitait. Et chacun le savait. Les traditions ne se perdaient pas, et étaient les premières choses enseignées aux plus jeunes. S'éloignant de nouveau, la veille lionne regagna son à-pic enneigé, là où il lui semblait presque toucher le ciel.

    Elle était certaine que personne ne viendrait la déranger à cet instant précis, pas même son nouveau Roi. Son attitude était plus qu'explicite, et la seule chose qu'elle recherchait à présent, c'était la solitude. Elle avait mené son rôle jusqu'au bout, en accompagnant les derniers instants de Theluji. Pour lui, elle avait porté ce lourd fardeau, et avait tenu tête au destin. Mais désormais, les yeux rivés vers l'horizon, elle ne pensait plus qu'à une seule chose. Quitter ce monde à l'avenir désespérément vide.

     
       

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  • Genre : RP Test

    Nom : Aux Grands Rois du passé succèdent de nouvelles étoiles

    Personnage : Héra

    Contexte : Entrevu entre Héra et Theluji

    Silhouette immaculée, Héra vagabondait dans la Vallée Blanche. Non pas qu'elle n'ait rien à faire, - il y avait toujours des choses qui attendaient - mais elle avait besoin de s'éloigner un peu. Pour réfléchir. De son pas chaloupé, la lionne traçait son chemin entre les sapins, parfaitement silencieuse. Chasseuse invétérée, elle avait appris à ne jamais se faire remarquer. Sa démarche, souple et puissante, et la parfaite maîtrise qu'elle avait de son corps taisaient chacun de ses pas. Elle n'était ni en chasse, ni à l'affut, mais c'était là une habitude qu'elle avait prise. Rester discrète et ne pas être aperçut tant qu'elle n'avait pas décidé de se montrer. Sa fourrure blanche comme la neige était un atout précieux. Évidemment, c'était une caractéristique typique des Nordiques d'avoir un pelage clair, mais le sien n'était pas seulement clair, il était d'un pur et lumineux, identique aux couleurs des Terres qu'elle parcourait chaque jour.

    En ce matin brumeux, une légère brise soufflait, emportant avec elle quelques flocons. Rien de bien dangereux face aux tempêtes qui sévissaient parfois pendant des jours, sans que le Clan puisse sortir chasser ne serait-ce qu'un instant. Le soleil n'était pas encore bien haut dans le ciel, mais Héra était débout depuis bien longtemps déjà, mettant un point d'honneur à veiller à ce que tout soit organisé avant qu'elle-même vaque à ses occupations. Les patrouilles de chasse devaient être efficaces et rapides pour pouvoir ramener de quoi nourrir toutes les bouches du Clan. Les lions chargés de patrouiller le long des frontières devaient être en action le plus tôt possible, pour couvrir un maximum de distance. C'était ainsi que tout fonctionnait. Bien sur, les conditions de vie des Nordiques n'étaient pas des plus faciles, mais elles étaient les mêmes depuis toujours, et ils les avaient peu à peu apprivoisées.

    Son regard doré scrutant chaque recoin, Héra avançait sans peine dans la poudreuse, pensive. Ce qu'elle avait entendu ne laissait rien présager de bon, et il était clair que quelque chose allait changer. Pourtant, aux yeux de la vieille lionne, cela ne regardait en rien les Nordiques, situés à des lieux des complots politiques de chaque Clan. Pourtant, ce n'était pas à elle que revenait la décision de s'engager, mais à Theluji. Grand Roi des Royaumes du Nord, c'était un lion un peu particulier, mais qui avait tout son respect. Noble et fier, il avait pour lui toute la confiance du Clan. Il était respecté, et même s'il avait tendance à s'isoler, Héra était là pour être ses yeux et ses oreilles quand il n'était pas là. La lionne au pelage de neige avait souvent la même opinion que lui, mais parfois, leurs points de vue différaient. Ils en débattaient alors, et Héra se justifiait toujours, mais le dénouement était incontestable, le dernier mot appartenant à Theluji.

    Bientôt, la Commandante des Guerriers Blancs atteignit une petite crête qui surplombait la vallée, laissant entrevoir une large partie de ses flancs neigeux. Elle s'arrêtant, humant l'air frais du matin. Oui, elle était ici chez elle, et ce sans aucun doute. Personne ne pouvait lui reprocher son identité et son rang, qu'elle avait acquis au mérite. Elle ne laisserait d'ailleurs personne douter de ses capacités à commander les Nordiques, personne d'autre que Theluji. Son regard perçant balaya les landes immaculées à la recherche d'un mouvement suspect, d'une quelconque information. Mais il n'y avait rien, personne d'autre qu'elle. Ou presque.

    --------------------------------

    Une fraction de seconde avant qu'un rugissement puissant se fasse entendre, Héra détecta la présence du grand mâle. A l'odeur, elle le reconnu instantanément, et le rugissement rauque confirma ses dires. La lionne blanche avait désormais à ses côtés le Grand Roi du Nord, aussi blanc qu'elle. Au fond, ils faisaient la paire. Tous deux dévoué au Clan, tous deux prêt à risquer leurs vies. Tous deux immaculés comme la neige. Cependant, ce n'était pas particulièrement surprenant. Héra, du moins, ne mettait pas cela sur le compte d'un quelconque signe. C'était juste le même sang, celui de leurs Ancêtres Nordiques, qui coulait dans leurs veines.

    La lionne se retourna, délaissant son point de vu, et se retrouvant face à Theluji. Le Grand Mâle blanc, bien qu'elle le côtoie chaque jour, continuait de l'impressionner par sa carrure et par la magnificence qui émanait de lui, comme si chaque pas qu'il faisait était parfaitement pensée. Il avait le don de toujours paraître sur de lui. Bien sur, il lui arrivait parfois de se tromper, mais il n'était jamais de mauvaise foi. Inclinant respectueusement la tête, elle le salua :

    « Bonjour Theluji. »

    Redressant la tête, elle plongea ses yeux dorées dans ceux azur de son Régent. Depuis le temps où il l'avait nommé Commandante, un long chemin avait été parcouru, et il avaient désormais confiance l'un en l'autre. Du moins était-ce l'avis d'Héra. Si, au début, leur relation était restée très courtoise et formelle, désormais, il y avait entre eux quelque chose qui les unissait, sans que la lionne puisse vraiment le définir. Ce n'était pas vraiment de l'amitié, mais quelque chose de semblable. Ainsi, lorsqu'elle avait besoin de lui, ou qu'elle estimait que la décision de son monarque n'était pas vraiment idéale, elle savait pouvoir proposer une alternative, lui rappeler certaines choses, sans qu'il s'en offusque. De même, elle savait que toute remarque venant de lui n'avait pas pour but de la blesser ou de la rabaisser, mais de la faire grandir dans son rôle. C'était ainsi.

    « As-tu besoin de Moi pour quelque chose ? Puis-je t'être utile ? »

    La voix de la lionne était claire, parfaitement maîtrisée. C'était une matinée paisible, et aucune trouble ne venait compromettre son humeur, si bien qu'elle s'adressait à Theluji en toute sincérité. Il lui arrivait parfois de parler d'un ton plus grave ou plus direct, sans toutefois ne jamais manquer de respect pour le grand mâle blanc. Certes, la limite était ténue et parfois presque invisible, mais elle était pourtant belle et bien là. Et, quoi qu'il se passe, elle le serait toujours.

    -------------------------

    Le Grand Lion Blanc s'inclina à son tour, dans un geste emprunt de fierté. Si Theluji était Roi du Nord grâce à ses capacités, il en avait aussi toute la carrure, et imposait le respect. C'était aussi pour cela que c'était un monarque respecté, et estimé comme plein de sagesse. Ce n'était pas un lion impulsif. Simplement en grand rêveur. Du moins était-ce là l'avis d'Héra.

    « Bonjour, ma jeune amie, répondit calmement Theluji. Il faut en effet que nous parlions de certaines choses, toi et moi. Des choses dont l'avenir dépendra tôt ou tard. Des choses dont j'aimerais avoir tes conseils avant de les mener à bien. Et puis...»

    Les oreilles de la lionne s'orientèrent légèrement vers l'arrière. Elle n'aimait pas quand son régent parlait de cette manière, bien que ce soit assez fréquent. Cela lui donnait l'impression que quelque chose d'important aller changer. Mais au fond, toutes les décisions de Theluji étaient importantes, alors pourquoi s'inquiéter ?

    « Et puis il nous faut parler du temps où je ne serais plus présent pour diriger les Nordiques. Celui-ci approche à grand pas. C'est une lutte que je suis destiné à perdre. Je ne veux pas gâcher le temps qu'il me reste en tentant de repousser la mort, mais en préparant ce qui arrivera après. Avec ton aide. Je tiens à te mettre au courant de ce que je projette, toi plus que n'importe qui d'autre a le droit de savoir. »

    Cette fois-ci, le visage d'Héra se ferma plus vivement. C'était donc cela. Il voulait parler de l'avenir, et de sa succession. Certes, il n'était plus tout jeune, et la vieille lionne s'était faite à l'idée qu'il n'était pas immortel, mais devoir songer aussitôt à l'après lui coûtait. Au fond, Theluji était pour elle une sorte de tuteur, de mentor. Elle lui devait tout, et ne pourrait sans doute jamais assez le remercier pour ce qu'il avait fait pour elle. Or, imaginer qu'il puisse disparaître, dans un jour proche ou lointain, était quelque chose de terriblement effrayant pour elle, sans qu'elle ose le reconnaitre.

    Le Grand Roi du Nord eut alors un étrange comportement qui renforça encore la crainte de la lionne blanche. Tandis que son regard azur, si perçant, s'était posé dans celui de sa commandante, il détourna le regard en laissant émettre un grognement rauque bien particulier. S'il n'avait jamais voulu montrer ses faiblesses, le grand mâle souffrait plus qu'il ne le laissait paraître. Et Héra n'avait pas besoin de le questionner pour savoir que cela devenait de plus en plus difficile à supporter. En fidèle commandante, elle ne fit aucune remarque, sachant pertinemment que Theluji ne voulait pas révéler véritablement son état. Elle ne savait pas bien à quoi il faisait allusion, cependant elle pensait avoir une idée assez précise. Alors elle parla, d'une voix calme, cependant tintée d'une légère amertume :

    « Tu sais comme Moi que tu n'es pas obligé de le faire. Les Nordiques n'ont rien à jouer dans ces mascarades politiques. C'est prendre des risques pour rien, et tu en as parfaitement conscience, alors pourquoi t'obstiner ? »

    Cependant, Héra savait parfaitement que, quoi qu'elle en dise, Theluji ne changerait pas d'avis. Elle espérait toujours, mais ses dernières illusions s'étaient envolées il y a bien longtemps. Et elle n'était pas du genre à perdre son temps dans des choses futiles dont elle savait qu'elles n'aboutiraient pas. Ce fut donc sur un ton légèrement plus distant qu'elle continua :

    « Quelles sont ces choses dont tu voudrais me parler ? »

    Ses yeux dorées cachaient mal l'infime lueur de tristesse qui s'était installé dans ses yeux lorsqu'elle avait songé que son Monarque serait voué à disparaître plus rapidement qu'elle ne se l'était imaginé. Cependant, elle garda la tête haute, prête à servir son Régent, comme elle ferait jusqu'au dernier moment. Jusqu'au bout. Sans aucunes hésitations.

    ------------------------------

    Une bise légère soufflait, soulevant légèrement la crinière du noble lion. A tout instant, il émanait de Theluji une sorte d'aura indéfinissable. Une aura de grandeur, de noblesse, qui était impossible à briser. Chacun de ses gestes était emprunt d'une parfaite maîtrise, et à cet instant précis, il ne paraissait déjà plus rien de la douleur qui l'avait terrassé un instant.

    ─ Tu doutes une nouvelle fois de la décision que j'ai prise... Je ne t'en veux pas pour ça, . Il n'est plus question de mascarades politiques ma jeune amie. L'enjeu est bien plus important. Ne crois pas que nous défendrons spécifiquement les royaumes d'en bas. Leurs petites querelles ne nous concernent en rien, je te le concède. Mais depuis cette attaque contre nous... Nous étions des cibles, Héra. Et nous le redeviendrons bientôt. Si ces lions noirs arrivent à rassembler de nouvelles forces, alors cette fois, le Nord tombera à son tour. Il nous faut agir avant eux, anticiper leurs réactions. Et cela passera par les combats du royaume d'en bas...


    Le Grand Roi du Nord détourna un instant le regard, mu par une pensée qu'Héra ne pu déchiffrer, bien qu'elle se doutât un peu qu'il s'agissait d'elle. Bien sur, elle soutenait toujours qu'il n'était pas obligé d'y aller, mais cela faisait déjà longtemps que Theluji avait prévu de se rendre dans les lointains Royaumes. Au fond, la vieille commandante n'avait jamais escomptée le faire changer d'avis. Elle avait simplement tenté, parce qu'elle ne renonçait jamais. Son interlocuteur finit par venir reposer ses yeux d'azur dans son regard doré. Une certaine douceur transgressait de lui, douceur qui avait autrefois plu à Héra. Elle avait toujours considéré Theluji comme une sorte de Mentor, mais ne pas le considérer comme un second père avait parfois été difficile. Cependant, il existerait toujours une limite entre eux. Elle était déjà si fine qu'Héra ne pouvait souhaiter l'affiner encore plus. C'était impossible.

    ─ Je suis prêt à tout faire pour donner à mon peuple un héritage digne de ce nom. Héritage auquel Késhia en fait parti. Il devient de plus en plus âgé, mais j'ai l'impression que son éducation n'en reste pas moins difficile. Il a besoin de soutien autre que le mien. Veille à ce qu'il soit conseillé correctement par les personnes qu'il faut. Il est décisif pour notre avenir...Penses-tu que ce choix... Celui de Késhia... Fut le bon?

    Avant que le vieux lion ajoute sa dernière phrase, un silence plana durant quelques instants. Ainsi, Héra ne s'était pas trompée. Theluji pensait au futur. Un Futur où il n'aurait plus lieu d'être. Cela semblait pourtant si lointain. Comment imaginer les Nordiques sans leur Grand Roi à leur tête ? C'était difficile. Difficile d'imaginer un autre à sa place. Quel qu'il soit. Détournant le regard, la lionne âgée se détourna un instant, posant de nouveau son regard sur la vallée. Comment avouer à Theluji qu'elle était effrayé à l'idée de sa mort ? Elle ne devait pas. Elle ne pouvait pas. Lorsqu'il partirait, ce serait à elle de relever le Clan. Comment pourrait-elle y arriver si elle s’effondrait ?

    ─ Tu laisseras derrière Toi un grand vide, Theluji. Et l'Héritage que tu laisseras aux Nordiques sera emprunt de ta noblesse. Mais, il est difficile d'imaginer un autre que Toi à nôtre tête.

    Sa voix, bien qu'elle ait tenté de la faire paraître assurée, vacilla. Héra n'osa pas croiser le regard de son Roi, certaine qu'il y aurait décelé le doute et la tristesse qui s'était allumés au fond d'eux. Oui, elle avait peur. La lionne blanche était reconnue pour son courage et ses valeurs, sa dévotion pour le Clan. Mais cette peur là, quoi qu'elle fasse, l’étreignait de plus en plus chaque jour. Et elle ne pouvait rien y faire. Il était possible d'éloigner une hyène ou de résister à une tempête. Mais comment tenter d'échapper à la mort ? S'éclarcissant la voix, elle ajouta :

    ─ Cependant, si tu penses que Késhia est destiné à prendre ta suite, alors je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour le guider et l'épauler comme je l'a fait avec Toi. .

    ----------------------------

    ─ Je te remercie, Héra. Tu as toujours fait beaucoup pour me venir en aide auprès des autres. Merci d'avoir cru au pauvre jeune lion que j'étais, même quand tu n'étais toi-même qu'une enfant. Je me demande ce qui aurait bien pu se passer si je n'avais pas eu à être le roi du Nord... Cela fait longtemps que je n'ai pas eu le luxe de m'amuser comme nous le faisions. La tâche est si sérieuse, et réclame tant d'attention...

    Au fond de la voix de son Roi, Héra pu ressentir comme une pointe de regret. Regrets face à l'enfance insouciante qu'ils avaient pu avoir. Regrets face au temps qui passaient, et qu'ils ne pouvaient arrêter. Regrets à l'idée de devoir bientôt laisser sa place et quitter ce monde. Mais ce n'était pas à lui de la remercier. Même sans elle, il aurait été Roi, alors que sans lui, Héra n'aurait pas eu l'honneur d'être à ses côtés. Elle lui devait sa vie.

    Il passa alors près d'elle, reprenant une attitude noble, innée chez lui, et fit quelques pas. Il la bouscula légèrement sur son passage, et continua son chemin. C'était intentionnel, le grand mâle maîtrisait parfaitement le moindre de ses gestes. Un léger sourire éclaira un instant le visage de la vieille lionne, avant d'être dissimulé sous un masque anxieux. Lorsque Theluji se coucha dans la poudreuse, le nez dans la neige, il souffla quelques mots que la guerrière pu saisir.

    ─ Pauvre de moi, je deviens gâteux avec le temps. Si je meurs, je préfère que ce soit dans une fin d'existence plus joyeuse que ce que j'ai vécu jusque là.

    Rivant son regard doré dans celui de son Roi, Héra pencha légèrement la tête. Elle avait toujours imaginé que Theluji, même s'il était discret et solitaire, se plaisait à diriger un Royaume aussi noble que celui des Nordiques. Elle avait toujours pensé que, même s'il y avait des passes difficiles, il y avait quelques petites choses qui le rendait heureux. Et elle se rendit compte qu'elle s'était en parti voilé la face. Le Grand Roi du Nord n'avait jamais été heureux. Il ne l'était pas. Ce fut d'un ton légèrement amer qu'elle lui répondit.

    ─ J'ai toujours pensé que tu étais heureux, Theluji. Pourquoi ne pas me l'avoir dit ? Je me trompais, et tu n'as rien fait pour me montrer la réalité.

    Tournant le dos à son Roi - chose qu'elle était une des seule à pouvoir se permettre - la commandante s'avança au plus près du bord, et scruta le sol en contre-bas. Pourquoi le vieux mâle n'avait-il rien fait pour la détourner de ses erreurs ? Pourquoi ne pas lui avoir avoué qu'il n'était pas heureux ? Elle aurait pu l'aider encore plus ! Il était déjà si réservé, comment aurait-elle pu deviner, alors qu'il semblait paisible et sur de lui à chacune de leurs rencontres ?

    ---------------------------------

    ─ Je suis heureux à ma manière, Héra. C'est une erreur de penser que je ne le suis pas, évite de la commettre je te prie.

    La remarque était faite d'un ton doux, sans reproches, aussi Héra essaya de ne pas le prendre pour elle. Toutefois, elle en fut légèrement blessé. Parfois, elle ne comprenait pas son Roi. Pourquoi lui dire qu'il préférait quelque chose de plus joyeux sans avancer qu'il avait été malheureux ? C'était étrange. Et difficilement compréhensible. Comme beaucoup de choses, malheureusement. Theluji la rejoignit, et se plaça à ses côtés. Fier, il contempla les immensotés blanches de son Royaume. Il avait de quoi être fière. C'était un lion honorable, et somme toute pacifiste. Un Grand Roi comme on en voyait rarement. Mais malheureusement pas immortel.

    ─ Penses-tu que je n'ai jamais pensé à une vie différente de celle-ci? Une vie où je n'aurais pas été fait roi, une vie où j'aurais vécu comme n'importe quel lion du clan, apportant mon lot à notre vie quotidienne comme il en est pour chacun? En tant que roi, ne puis-je pas aspirer à une vie normale, tout autant qu'un lion normal aspirerait à devenir roi? Qu'en dis-tu? Ne me dis pas que tu n'as jamais songé à une telle option, celle de ne pas occuper un poste si important au sein de notre royaume.

    Il avait posé son regard dans le sien avec tant de tendresse que la vieille lionne ne pouvait lui en vouloir. N'avait-il pas raison ? N'avait-elle jamais souhaité pouvoir partir, pouvoir vivre sa vie sans être observé à chaque instant ? Sans devoir porter le poids d'un Clan si intimement lié à ses monarques ? Lorsque le grand mâle posa sa patte sur le poitrail d'Héra, cette dernière ne pu s'empêche de frissonner. S'ils se côtoyaient depuis des années, ils n'avaient guère de contacts physiques. Sauf lors des entraînements ou des parties de chasse, mais alors, c'était un geste tout autre, plus brutal et plus violent. A cet instant précis, la patte de Theluji semblait douce et encourageante. Comme un père.

    ─ Ecoute ce qu'il te dit. Nous sommes tous des lions, Héra. Roi, commandant, conteur... Tout cela n'est que titres que nous rajoutons à ce que nous sommes. Fondamentalement, nous restons des lions, avec toutes les attentes que cela incombe. Trop souvent, il me semble, nous ne sommes disposés à l'oublier. Les Nordiques. Les Pridelanders. Tous des lions. Tous pareils et tous différents à la fois. Mais restant en tout et pour tout des lions.

    Un léger goût amer s'empara de la bouche de la Commandante des Guerriers Blancs. Reculant de quelques pas, elle échappa au doux contact de son Roi, et baissa les oreilles. Mais alors, pourquoi tout cela ? Héra était une lionne aguerrie et rodée au fil de la vie. Mais pourtant, elle n'avait jamais compris certains détails qui restaient sombres. Certains détails que personnes ne s'étaient jamais appliqué à dénouer. Sa voix était amère lorsqu'elle parla, son regard fuyant celui de son Roi :

    ─ Mais alors, pourquoi tout cela ? Pourquoi tant de haine entre les Clans ? A quoi cela sert-il de se donner des rangs et des titres si, au fond, nous sommes tous pareil ? Je ne comprends pas, Theluji. Quel est le sens de tout cela ? J'ai beau avoir vécu, je ne sais toujours pas.

    Si la fin de sa phrase était soufflé d'un ton plus profond, il n'en ressortait pas moins une profonde incompréhension, qui cachait bien des questions et des soucis. Peut-être Theluji comprendrait à quoi elle pensait. Peut-être pas. Mais là n'était pas là question. Comme n'importe quel lion, Héra avait ses faiblesses, et si elle savait se montrer noble et fière face à tant de chose, la mort était quelque chose qui la brisait.

    ------------------------------

    ─ Nous sommes tous pareils. Mais pas identiques.

    Et alors ? En quoi cela était-il une raison aux guerres et aux rivalités ? La vieille lionne n'était pas comme Theluji, mais pourtant, ils cohabitaient parfaitement, même s'ils n'étaient pas toujours d'accord. Elle comprenait que certains puissent ne pas s'entendre ou ne pas être d'accord, mais de là à tuer et à ravager ? Était-ce une raison valable ? Ce fut à ce moment là que son Grand Roi tourna la tête vers elle :

    ─ Combien même nous demeurons des lions, nous sommes également imparfaits. La nature nous modifie. Elle nous façonne, et ce, dès notre plus jeune âge. Ainsi, nous nous démarquons dans de vaines tentatives de savoir qui nous sommes réellement. Parce que certains pensent être naturellement supérieurs à d'autres comme les prédateurs sont supérieurs aux proies, cela devient un prétexte au pouvoir. Peu à peu, il arrive que l'on soit corrompu par de mauvais esprits. Tu as vécu, c'est vrai. Tout comme moi j'ai vécu. A mon humble avis, il vaut mieux que des choses restent hors de portée de notre connaissance, malgré toutes ces années.

    Sa voix était lourde de sens, et Héra ne répondit rien. Par instant, elle n'aimait pas ce monde dans lequel elle vivait. Elle aspirait à rejoindre un mon meilleur, là où personne ne se faisait la guerre, et là où plus rien n'était réellement important. Là où elle pourrait retrouver des êtres chers partis bien trop tôt à son goût. Et peut-être un jour Theluji.

    ─ Lorsque je le verrais, je dirais à ton père, mon vieil ami, qu'il a toutes les raisons d'être fier de sa fille. Tout deux avez grandement honoré votre famille.

    La commandante leva ses yeux dorés vers le vieux mâle. Son regard trahissait une peine immense, et si aucune larme ne coula, ce fut tout comme lorsqu'elle croisa le regard de celui qui avait - par moment - pris la place de son père disparut. Mais lui aussi allait disparaître, et elle se retrouverait bientôt toute seule. Et elle avait peur. Pour la première fois de sa vie, elle était réellement terrifiée à l'idée de ce que le futur avait à donner. Cela ne pourrait pas remplacer le vide que Theluji s'apprêtait à laisser derrière lui. D'une voix faible, elle déclara à son tour :

    ─ Tu lui diras que je l'aime. Et qu'il me manque à chaque instant. Tout comme tu me manqueras, Theluji.

    Puis, sans un mot de plus, elle se détourna, et s'éloigna la tête basse. Si Theluji était son Roi, elle savait qu'il ne lui tiendrait pas rigueur de son comportement. Tourner le dos à son régent n'était pas une chose que n'importe qui pouvait se permettre.

     

     
       

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  • Genre : RP (1 réponse)

    Nom : Step Down, Step High

    Personnage : Hatari

    Contexte : Hatari a appris que les jeunes Jangowas étaient revenus d'exil, et que l'un d'entre eux va défier l'Empereur. Il se rend donc dans le désert.

     

    Il s'était fait discret. Personne ne l'avait vu. Personne ne l'avait prévenu. Mais il avait su. Peut-être était-ce son instinct, ou bien une simple intuition. Toujours était-il qu'Hatari était arrivé à temps. Au parfait moment. Lorsqu'il s'était rendu compte que cela faisait désormais presque une année qu'il avait quitté le désert, une vieille tradition avait resurgit, et il s'était rappelé que les jeunes partis en exil seraient de retour sous peu. Et parmi eux, il savait que certains - et plus particulièrement un - avait des vus sur la place d'Empereur. Or, son retour d'exil serait le parfait moment. Alors il était parti.

    Il avait refait son chemin à l'envers, sans détours. Il avait traversé des territoires connus et inconnus, vu défiler le jour et la nuit sans guère y prêter attention. Il ne songeait qu'à arriver à temps, mais la route était longue. Et s'il savait parfaitement se repérer dans certains territoires, la tache se révélait plus ardu dans à certains passages, et plus encore dans l'obscurité. Cependant, quand enfin il aperçut le désert - après avoir remarqué que les températures se faisaient plus clémentes - il fut soulagé. Il n'avait pas croisé de lions en chemin, mais il espérait que tout ne s'était pas encore joué.

    Cependant, même une fois dans le désert, son voyage n'était pas terminé. Il devait encore trouver où les Jangowas s'étaient installés, et le faire sans se faire remarquer. Autant dire que ce n'était pas gagné d'avance. Néanmoins, à force de persévérance, il parvînt à les localiser. Et si, après les avoirs observé, il n'était pas certain de reconnaître le futur prétendant - et donc de savoir s'il avait loupé le retour de ce dernier - Akili paradait toujours. Il n'avait donc rien loupé. Alors, Hatari se terra, et vécu dans l'ombre des Jangowas durant quelques jours. C'était compliqué, car le vent changeait sans cesse de direction, et il devait être plus que vigilant pour ne pas se faire voir. Mais il avait appris l'art de se faire discret.

    Et enfin, un matin, un nouveau lion rejoignit le clan. Et si l'exilé ne pouvait rien entendre, il pouvait observer. Et quand le clan entier fit cercle autour d'Akili et du nouveau venu, alors il su que l'heure était arrivé. Et peut importe l'issue, il ne voulait pas manquer cela. Alors il s'approcha. Qu'importe, désormais, qu'il se fasse repérer. Il était libre de toute entrave. Et tandis que le combat faisait rage, le hors-la-loi observait son ancien clan. Il vit bien des connaissances, mais aucun sourire ne se dessina jamais sur ses babines. Un mur, rien qu'un masque impénétrable, et rien d'autre. Une légère brise soulevait sa crinière, emmenant avec lui des poignées de sable.

    Et puis, après un duel sauvage, Akili se retrouva au sol, et le jeune mâle planta ses crocs dans le museau du vieil Empereur. Même d'où il était, Hatari apercevait les tâches sombres sur le sol. Désormais, même si le vainqueur ne lui donnait pas le coup de grâce, Akili mourrait. Ce serait la fin d'un règne, et le nouveau d'un autre. L'Empereur qui l'aurait banni ne serait plus. Mais cela ne changerait rien. Hatari ne renoncerait pas. Ce jeune mâle avait vaincu, et l'ancien Jangowa savait que ce n'était pas une mince affaire. Mais il lui avait par la même occasion volé sa vengeance. Ça, et l'occasion de tenir une nouvelle fois tête à Akili. De déchirer la moindre parcelle de son corps. De le ruiner.

    D'un geste lent, Hatari se leva. Il avait parfaitement conscience qu'on pouvait l'apercevoir et le reconnaître sans mal. Il croisa même le regard de Léhona. Mais qu'importait ? Qu'ils viennent, ceux-là même qui l'avaient chassés sous les ordres d'Akili. Qu'ils viennent, et Hatari n'en épargnerait aucun. Ni mâle, ni parents, ni anciens compagnons. Aucun. Sauf peut-être le nouvel Empereur, s'il se révélait n'avoir aucun lien dans l'affaire. Mais l'exilé se doutait que le jeune mâle ne laisserait pas un hors-la-loi mettre son clan à terre. Qu'importe alors, il le tuerait aussi. Et ensuite, il partirait. Il n'avait nul désir de prendre la place d'Empereur du désert. Peut-être mourrait-il avant. Peut-être pas. Seul l'avenir le dirait. Alors, tournant le dos, le mâle s'engagea de nouveau dans les immensité du désert, solitaire.

     
       

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  • Genre : RP

    Nom : Escapade dans les Gorges

    Personnage : Hatari

    Contexte : Alors qu'il est loin du désert, Hatari tombe nez à nez avec Niwata, son ancienne apprentie.

     

    Le soleil était à son zénith lorsque Hatari pénétra dans les gorges. La roche réverbérait le moindre rayon, rendant la chaleur bien supérieur à celle de l'atmosphère hors du long corridor de pierre. Mais peu importait. Il avait vécu si longtemps dans le désert que la chaleur ne le dérangeait plus. Alors il continua son chemin, s'engageant dans l'étroit passage. Par endroit, les deux immenses falaises s'éloignaient l'une de l'autre - formant comme une petite clairière - avant de redevenir proche l'une de l'autre, formant un étroit passage.

    Le jeune mâle était déjà passé plusieurs fois par ici, comme il les avait contemplé d'en haut, lors de sa rencontre avec Kuzali notamment. S'il savait désormais que ce qu'il cherchait ne se trouvait plus sur Prideland, il n'en était pas pour autant parti. Il avait besoin d'en apprendre plus, sur ce qu'il se passait notamment. Et sur lui-même. Il avait tant de fois repoussé ses projets en pensant ne jamais pouvoir les réaliser qu'il devait désormais se rendre à l'évidence ; il touchait enfin du doigt ce qu'il avait toujours attendu. Des réponses. Alors il prenait son temps.

    Sa vie de solitaire lui plaisait. Il ne dépendant plus de personne, et ne vivait que pour lui. Il n'avait pas à se soucier des politesses et des frontières, pas à se méfier des lions qu'il croisait. Un importun ? Il le ferait taire. Un rival ? Il le coucherai à terre. Car s'il se préparait mentalement à franchir en pas dans son histoire, il n'en délaissait pas moins le côté physique. Il marchait chaque jour, de l'aube jusqu'au crépuscule. Il courrait, chassait, et se musclait chaque jour un peu plus. Cependant, même si sa silhouette s'était un peu élargit depuis son départ du désert, il n'en restait pas moins un lion aux courbes longilignes. Il ne pourrait jamais se défaire des ses origines.

    Le jeune mâle marchait donc d'un pas ample, à la foulée souple. Les mèches de sa crinière retombant sur son front le protégeaient du soleil, cachant par la même occasion certaines parcelles de son champ de vision. Mais peu importait, puisqu'il ne redoutait rien. Qu'y avait-il de pire que la mort ? Rien. Or, il ne craignait pas cette dernière. Il ne redoutait donc aucun danger. C'était orgueilleux et prétentieux de sa part, mais l'ancien Jangowa changeait. Il était désormais loin du lion sage et patient, dévoué à son clan. Il était un exilé, un hors-là-loi qui n'avait que faire des règles établies, et profitait pleinement de sa liberté, sans s'entraver avec les diverses limites des autres clans. Hatari continuait donc son chemin à travers les gorge, sans se douter qu'il allait une fois de plus devoir faire face à son passé. Un passé qui avait changé bien des choses.

    ------------------------------

    Chacun de ses pas formait un petit nuage de poussière tant le sol était sec et chaud au fond des gorges. Mais cela ne gênait guère Hatari, habitué au sable brûlant du désert. Alors il continuait sa marche, sans vraiment s'en soucier. Jusqu'à ce qu'une ombre se découpe au loin, soulevant elle aussi un nuage de poussière. Un autre lion. Et plus ce dernier se rapprochait, plus le jeune mâle plissait les yeux. Cette silhouette avait quelque chose de déjà vu. Comme s'il la connaissait.

    Lorsqu'enfin la silhouette fut bien visible, Hatari s'arrêta. Il n'était guère d'humeur joyeuse, mais n'était pas non plus dans ses plus mauvais jour, à dévoiler ses crocs à la moindre rencontre. Et il y avait cette petite chose au fond de lui-même. Il savait son instinct rôdé, et ne doutait pas que l'impression qu'il avait était bien réelle ; il connaissait cette lionne. Et tandis qu'il la détaillait, elle déclara :

    ─ Heu.. Bonjour ?

    Il ne répondit pas. Il était trop occupé à observer ce pelage clair, et ses yeux bleus. Il y avait aussi ce museau pale. Aucun doute. Il avait déjà croisé ce regard, et plus d'une fois. Et si la voix était différente de celle à laquelle il s'attendait, il eut un déclic. Cette lionne, il la connaissait bien. Il la connaissait même très bien. C'était Niwata. Il en était désormais certain. Et rien ne lui faisait penser le contraire, mis à part sa taille et sa corpulence. Lorsqu'il l'avait quitté, c'était encore un lionceau, presque adolescente. Mais cela faisait bien longtemps qu'il avait quitté le désert désormais, et nul doute que son ancienne apprentie avait grandit.

    Toutefois, il ne laissa rien paraître. Elle ne semblait pas l'avoir reconnu, et il n'était pas certain de le souhaiter. Si les pensées se bousculaient dans son esprit, il resta immobile et silencieux, ne faisant que relever légèrement son regard. Que faisait-elle ici ? Et avait-il tant changé pour qu'elle ne le reconnaisse pas ? Devait-il lui dire qui il était réellement ? Jadis, il l'avait considéré comme sa soeur, et aurait donné sa vie pour la protéger. Mais elle avait été incapable de comprendre qui il était réellement, et ce qu'il souhait. Incapable de le comprendre, ou de l'accepter. Aurait-ce changé ? Il n'était pas sur de vouloir le savoir, au fond.

    ─ Je doute de pouvoir t'être utile.

    S'il n'était pas agressif, il n'était pas non plus du genre à bavarder gaiement. Il avait toujours été taciturne, et plus encore depuis qu'il était exilé. Et même si ses sentiments vis à vis de Niwata étaient partagés, il n'en était pas moins distant et indifférent. S'il avait attendu un moment avant de lui répondre, partagé entre la possibilité de reprendre son chemin, et celle de répondre à la jeune lionne, il avait finit par répondre. Sans y mettre du sien.

    --------------------------------

    Et tandis qu'il observait son ancienne apprentie, un autre lion s'approcha. Celui-ci était inconnu d'Hatari, c'était un grand mâle au pelage foncé. Et étrangement, Niwata sembla soulager de le voir arriver. Et l'exilé compris rapidement que les deux voyageaient ensemble ou - du moins - se connaissait bien, lorsque la lionne Jangowa le rassura quant à son compte. Hofu, c'était le nom du nouveau venu. Hatari, quant à lui, resta immobile, n'ayant guère de choses à dire. Cependant, les dires de Niwata laissaient à penser qu'elle n'avait pas terminé :

    ─ Dit-moi, toi, ne t’appellerais-tu pas Hatari ? Je connais un vieux mâle de ce nom qui te ressemble énormément.. Peut-être, espérais-je, que c’est toi, n’es-ce pas ?

    Un rictus se dessina alors sur les babines de ce dernier. Finalement, elle semblait l'avoir reconnu. Mais elle n'en était pas certaine. Il aurait pu nier, mais à quoi bon ? Au contraire. Cela ne lui apporterait rien de plus. Niwata « espérait ». Souhaitait-elle le revoir ? Et pour quelles raisons ? Ne se souvenait-elle pas de leur dernière entrevue ? Ne se souvenait-elle pas de tout ce qui avait alors été dit ? Lui s'en souvenait parfaitement. Le moindre mot. La moindre menace. D'un ton moqueur, il répondit alors :

    ─ Ah, je vois que tu te souviens de moi, finalement. Ai-je tant changé pour que tu ne me reconnaisse pas ? Ce n'est pourtant pas moi qui suis censé avoir grandit.

    Puis, jouant de son rôle, il se tourna vers Hofu, et ajouta d'un ton égal à lui-même :

    ─ Je me présente ; Hatari, exilé Jangowa. Banni et recherché pour avoir refusé de me battre contre Akili. J'ai juré de le tuer, ainsi que quiconque se mettrait en travers de ma route.

    Au moins, les choses seraient claires pour Hofu. Hatari ne le craignait pas, pas plus que Niwata. Certes, ils étaient deux, mais cela faisait désormais plus d'un an que le mâle vivait dans le désert. Autant dire qu'il avait croisé plus de dangers que quiconque, et que cela - ajouté à son expérience dans le désert - faisait de lui un redoutable combattant. Reportant son regard sur Niwata, le visage impassible, et la voix désormais sérieuse, il ajouta :

    ─ Niwata m'a jadis avancé qu'elle ne me laisserait pas toucher à son Empereur. Mais elle ne fera pas exception, et a déjà utilisé sa dernière chance.

    Le regard de l'exilé brillait à nouveau de la lueur qui ne l'avait jamais quittée, un mélange de colère et d'incompréhension. De regrets, aussi. Sa face s'était fermée, et il fixait désormais Niwata la tête haute.

    -----------------------------------

    Si Hofu semblait se forger un avis sur la personne de l'exilé, il n'en laissa rien paraître, et répondit d'un ton calme :

    ─ Et bien Hatari, je suis ravis de rencontrer une autre connaissance de Niwata, et par la même occasion un autre exilé. Je suis Hofu, exilé de Prideland, et Niwata est ma partenaire de voyage. Elle est également sous ma protection et n'a plus rien avoir avec les Jangowas, donc vos "menaces" sont je pense déplacées bien que j'ignore quels étaient autrefois vos rapports.


    Ainsi, il était aussi exilé. Dernièrement, Hatari avait le don de les croiser. Cependant, il ne voyait guère en quoi on pouvait être exilé de Prideland. Les Pridelanders n'étaient pas réputés pour être intraitables, loin de là ! Néanmoins, le mâle n'avait pas l'intention d'aller poser la question, car la suite lui déplaisait légèrement. Ainsi, Niwata avait su se trouver un second Mentor. Un autre lion qui, lui, ne l'abandonnerait pas. Si Hatari était un tant soit peu jaloux d'avoir été remplacé aussi facilement, il n'en avait désormais plus grand chose à faire. Les choses avait bien changé depuis le temps où Niwata et lui était très proche, au point qu'il l'ait un jour considérée comme sa sœur. Il ne semblait même rien en rester.

    ─ Je me permets de te corriger au début de ton récit, Hatari : D’abord, les Jangowas ne t’ont pas exilé car tu as refusé de « te battre contre Akili » mais simplement parce que tu avais refusé de combattre les Mositus, tout de suite les choses ne sont plus pareils, tu ne crois pas ? Deuxièmement, on n’est pas obligé de grandir pour avoir changé... Tu en es la preuve, ce serait mentir de te dire que tu es toujours le même et que, jamais lorsque je te vois aujourd'hui, je n’ai vu quelqu’un d’autre à la place de celui que j’avais toujours souhaité voir.

    Elle marqua une pause, avant de terminer :

    ─ Visiblement, je vois que notre ancien Empereur a beau être vieux, mais il reste plus fort que certains d’entre nous, si tu vois ce que je veux dire. Même en exilant l’un de ses soldats, loin ou à côté de lui, il arrive à les hanter et à leur pourrir la vie alors qu’ils sont surement dans un endroit meilleur, dans une tranquillité qu’ils ont toujours recherché avant de partir du Désert. Au lieu qu’ils profitent de leur occasion de vivre comme ils l’ont toujours rêvé, ils continuent inutilement à dépendre d’Akili en voulant tout faire afin de le tuer, l’empoisonné, ce que tu veux, plutôt que de prouver au Grand Désert qu’ils sont plus fort mentalement que leur ancien Clan en oubliant immédiatement ce que ce dernier leurs ont fait et en débutant une nouvelle vie, plus fort que jamais, et... Bon, je crois en avoir assez parlé à ce sujet.


    Ainsi, elle en venait à ce point. Elle ne devait donc pas avoir réellement compris la chose. Toutefois, même s'il était en colère depuis bien longtemps, il n'en restait pas moins parfaitement maître de lui-même. D'un ton toujours neutre, il darda son regard brûlant dans celui de Niwata, et répondit :

    ─ Tu es loin de la réalité. Tout comme je suis loin du Désert. Akili ne me hante pas jour et nuit, bien au contraire. Si je n'avais pas su me détacher de mon exil, alors il je serai déjà revenu le défier depuis longtemps. Or, je n'ai cessé de cheminer vers un but tout autre depuis mon départ. Mais tu es encore trop jeune pour comprendre. Tu n'as pas l'expérience d'une vie, et tu ne pourras l'acquérir aussi vite que tu le voudrais. La vie ne se résume pas aux Amis et aux Ennemis, ni à la Guerre ou à la Paix.

    Il marqua lui aussi un temps d'arrêt. S'il était plus vieux que Niwata de quelques années, il avait parfois l'impression qu'il aurait pu être son père, tant leur différences de caractères étaient flagrantes. Elle était jeune, innocente, à peine sortie de l'enfance. Lui avait déjà tué, et avait renié bien des compagnons. Comment aurait-elle simplement pu le comprendre ? Même Hofu, qui ne le connaissait pas, avait plus de point commun avec lui que la jeune lionne.

    ─ Quant aux corrections que tu te permets d'apporter, permet moi de te rappeler que tu n'étais pas là. C'est vrai, je n'ai pas refusé de me battre contre Akili mais pour lui. Et cela ne fait que rendre les choses encore plus ridicules.

    Plus leurs rencontres s’espaçaient, plus elles devenaient menaçantes. Car lui n'oubliait pas. Il n'oubliait pas qu'elle était Jangowa, et qu'elle l'avait toujours revendiqué, même lorsqu'ils l'avaient chassé. Et il n'oubliait pas qu'il avait juré de tuer chacun d'entre eux.

    S'il avait un temps escompté l'épargner, parce qu'elle n'avait pas choisit de vivre dans le désert, et qu'elle n'était en rien impliqué dans son exil, il avait changé d'avis. Elle l'avait fait changer d'avis. Elle lui préférait son Clan, alors qu'il avait tant donné pour elle. Elle n'avait pas su comprendre son besoin d’éclaircir son passé quand elle même avait vécu une enfance difficile. Elle l'avait jugé, sans chercher à comprendre. Au fond, elle ne l'avait jamais aimé et apprécié comme lui l'avait fait. Et c'était sans doute la base de tout. Et la cause de sa désillusion. S'il ne lui avait jamais dit, et ne lui dirait sans doute jamais, c'était sans doute à elle qu'il en voulait le plus. C'était son secret le plus profond. Celui que personne n'avait seulement entrevu. Avec le recul, tout était de sa faute. Elle était la plus coupable, celle qui avait réduit en miettes ce qu'il avait mis tant de temps à reconstruire. C'était d'elle qu'il devait se venger. Et sans doute de personne d'autre. C'est pourquoi, lorsqu'il repris la parole, sa voix était plus froide. Plus distante.

    ─ C'est vrai, j'ai simplement refusé de combattre les Mositus. Mais quelle importance à ce « simplement » pour Toi, Niwata ? Tu n'étais qu'un bébé. Ils ne t'avaient rien fait. A Moi non plus. Pourquoi tuer des lions innocents, quand la Guerre fait déjà des ravages ?

    Plus il retournait la phrase de Niwata dans sa tête, plus il était en colère. Comment pouvait-elle simplement avancer une telle chose ? Elle ne connaissait même pas la guerre ! Sa dernière phrase fut cinglante, tant la colère montait :

    ─ Ce n'est pas parce que tu as perdu tes parents que tout le monde doit en faire autant. Le monde est injuste, mais ce n'est pas à Toi de juger de ce qui est juste, et de ce qui ne l'est pas. Ce n'est pas à Toi de faire justice, Niwata. Tu ne connais rien à la vie.

    -------------------------------

    Ce fut Hofu qui intervînt alors, sans laisser à Niwata la possibilité de répondre :

    ─ Si vous continuez de la sorte, cette conversation n'aboutira à rien d'autre qu'à une bagarre. Est-ce donc ce que vous cherchez? La seule chose que vous faites est de tenter de vous prouver l'un à l'autre que c'est l'autre qui a tord, et cela ne vous mènera nulle part.

    Il s'adressa ensuite à Niwata, d'une façon fort convenable. Hatari n'écouta que d'une oreille. Cela ne le concernait pas, ce n'était pas à lui qu'on s'adressait. Peu importait qu'on parle de lui, du moment qu'il n'était pas celui qui devait écouter. Encore aurait-il fallu qu'il l'accepte.

    ─ Encore une fois, je ne sais que ce que j'ai pu entendre. Surement en savez vous tous les deux plus que moi, et si vous voulez continuer à vous chamailler et bien libre à vous de le faire. Quoi qu'il en soit je suis convaincu que vous crier dessus n'arrangera pas les choses.

    Le mâle longiligne regarda tour à tour Hofu et Niwata. La lionne avait su s'entourer d'un compagnon sage, à n'en pas douter. Il n'y avait plus qu'à espérer que tout deux sache à quoi s'attendre de la part de l'autre. Encore que ce n'était pas là la préoccupation d'Hatari. Au fond, il n'en avait que faire. Tant pis si Niwata avait mal choisit, ce serait de sa faute. Néanmoins, l'exilé trouvait Hofu sympathique - dans la mesure du possible pour un lion comme Hatari - et partageait certain point de vu avec lui. Comme d'autres points communs, somme toute. Le solitaire posa donc son regard sur le mâle gris, et déclara d'un ton neutre :

    ─ Certes, cela n'arrangera rien. Tu es un lion sage Hofu. Je ne suis pas le genre de compagnon que les lions recherchent, mais sache que je ne te considère pas comme un rival, et que croiser ta route à nouveau ne me déplairait pas.

    Puis, il releva la tête, scrutant le ciel. Il était temps pour lui de continuer son chemin. Il n'était pas encore prêt à mettre un terme à tout cela, d'une quelconque façon que ce soit. Ni avec Niwata, ni avec lui-même. Au fond, croiser son ancienne apprentie faisait remonter en lui différentes choses, et non une seule. Il y avait Niwata, bien sur, et c'était sans doute le principal, mais il y avait aussi son exil et la menace d'Akili, ainsi que son histoire personnelle. Autant dire que le chemin était encore long.

    ─ Il est temps pour Moi de continuer mon chemin. Pardonne-moi de ne pas m'attarder plus, Hofu. Que ta route soit sure.

    Il s'adressait uniquement au mâle volontairement. Car il avait bien d'autre chose à dire à Niwata. Mais il ne voulait pas brusquer Hofu, et préférait attendre. Le temps ferait que les choses se passeraient ou non, mais il n'était pas encore temps. Tournant sa tête vers Niwata, son regard se fit plus perçant, et sa voix plus froide lorsqu'il parla :

    ─ Quant à toi Niwata, soit sure que nous nous reverrons. Je n'en ai pas finit avec tout cela. Profite tant que tu peux, et ne te mêle pas de ce qui ne te regardes pas. Je ne ferai pas un seul pas en arrière.

    A elle de l'interpréter comme elle le voulait. Lui savait parfaitement ce qu'il entendait. Et il ne plierait pas. Il avait cette volonté farouche qui pouvait parfois animer un être lorsque quelque chose de profond se déchirait, encore et encore. Il avait changé, certainement. Sans plus attendre, il repris sa route, passant entre les deux lions et frôlant chacun d'entre eux au passage. Qu'ils lui sautent dessus si telle était leur volonté.

     

     
       

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  • Genre : RP

    Nom : Lost in the Night Sky

    Personnage : Hatari

    Contexte : Arrivé sur Prideland, Hatari fait une rencontre qui pourrait changer bien des choses.

     

    Prideland. Enfin. Après tant d'années, tant de souffrances et de colère. Tant d'incompréhension et de questions. Il retrouvait sa terre natale. Celle où il avait vu le jour, en même temps qu'Usiku. Celle où il avait grandit, et appris à connaître le monde, sans jamais être seul. Toujours avec son jumeau. Plus fusionnel qu'il ne l'avait été avec personne. Jusqu'à ce qu'une nuit fasse tout basculer. Et depuis, rien n'avait jamais plus été pareil. Et il n'avait jamais eu les réponses qu'il espérait tant. Alors il avait décidé qu'il irait les chercher lui-même, et qu'il réparerait les torts causés par le passé. Jadis, il était un lionceau plein d'entrain et curieux de tout. Aujourd'hui, Hatari n'était plus qu'un lion refermé sur lui même, en colère et frappé par le destin une nouvelle fois.

    Mais après tant de chemin tortueux, tant de souffrance, il avait su regagner sa liberté, et quitter ce désert qu'il n'avait jamais réellement apprécié. Et depuis, il n'avait cessé d'avancer. Nuit et jour. Il avait parcouru des kilomètres pour regagner ses Terres d'origine. Et enfin, il les foulait. C'était comme une première victoire. Un délicieux supplice. Mais qui n'était qu'une empreinte de pas dans ses projets. Il avait encore tant à faire. Le jeune mâle ne redoutait pas la tâche, et ne craignait pas d'y laisser une quelconque partie de soi-même. Il n'avait plus rien à perdre, à part cette petite étincelle de vie qui le maintenait, et à laquelle il ne tenait pas plus que cela.

    Près d'un lac autour duquel il avait tant vécu d'aventures, il marchait ainsi. La nuit était silencieuse, et aucun bruit ne venait troubler le silence apaisant qui régnait là. Les étoiles se reflétaient dans l'eau, et miroitaient à sa surface. L'ambiance y était rassurante. Sereine. Comme s'il ne s'était jamais rien passé. Peu importe ce que c'était, cet instant de calme était un baume sur bien des choses. Il apaisait sa colère, et libérait son cœur. Il cicatrisait ses blessures encore récentes, traces ineffaçables du combat qu'il avait mené pour conserver sa liberté. Infime déchirure dérisoire par rapport à celles de son âme.

    Ce fut seulement après qu'il aperçut cette masse sombre couché dans l'herbe. Alors il s'arrêta. L'obscurité l'empêchait de distinguer le lion qui se trouvait non loin de lui, à l'abri des rayons de la lune. Malgré sa vue perçante, le jeune mâle était incapable de percevoir la couleur du pelage. Incapable d'identifier celui qui se trouvait à quelques pas de lui. Seule l'absence de crinière lui permettait de savoir que c'était une lionne. Une Pridelander ? C'était presque sure. Même s'il n'était pas loin de la frontière, il était sur leurs Terres. Immobile, il cherchait à comprendre. Mais il était incapable de faire un pas de plus, figé par une idée confuse. Il était parti il y a des années de cela. Et depuis, il n'était jamais revenu. Comment savoir si ses parents étaient encore vivants ? Si Usiku était encore vivant. Serait-il capable de les reconnaître ? Et eux, devineraient-ils qui il était ?

    S'il leur en voulait, et s'il en voulait à son jumeau plus qu'à quiconque, Hatari ne ressentait à cet instant précis aucune colère. Il ne savait que penser. Il n'avait pas les réponses. Seulement celles qu'il avait tenté d'imaginer. Rien de plus. Et face à cette inconnue, ses plus solides convictions s'effritaient. Et lorsque la lionne tourna la tête, en cherchant à savoir qui se trouvait là, il ne répondit pas. Murmure doré dans la nuit.

    ------------------------

    Immobile, le jeune mâle observa la lionne scruter la nuit à la recherche de quelque chose. Ou de quelqu'un. Puis elle se mit en mouvement, silhouette furtive sous la lune, qui dévoila peu à peu ce que l'obscurité avait jusque là caché. C'était une lionne au pelage couleur cendre, tirant légèrement vers le brun. De larges rayures brunes courraient sur son corps, dénotant une singularité bien particulière. Une mèche blonde ornait sa tête au port altier. Une lionne qu'Hatari n'avait sans aucun doute jamais vu. Et lorsqu’enfin elle l'aperçut, silencieux dans la nuit, il ne bouge pas pour autant :

    ─ Pourquoi ne répondez-vous pas ? Êtes-vous muet ?

    Et tandis qu'elle s'asseyait, sans aucune craintes face à ce mâle inconnu, le jeune exilé ne se décala pas. Un instant, il avait cru tomber sur une lionne qu'il avait déjà connu. Il s'était préparé à affronter son passé de plein fouet, sans pouvoir y échapper. Et réaliser que rien de tout cela n'arriverait était à la fois un soulagement et une déception. Il attendait depuis tellement longtemps de retrouver le monde qui avait construit son passé qu'il en voulait presque à la jeune lionne. Lorsqu'il répondit, après un moment de silence, son ton était donc froid, teinté de déception :

    ─ Rien ne m'y oblige.

    Pour un peu, il en aurait presque tourné le dos à son interlocutrice, pour passer son chemin. Peut-être le ferait-il. L'indifférence qui l'avait un instant quitté lorsqu'il s'était cru proche de son passé s'était de nouveau installé, rendant son visage inexpressif. Seul ses yeux couleurs brun trahissaient ses sentiments. Des regrets. De la colère. Un douleur jamais vraiment oubliée. A l'odeur de son interlocutrice, il su qu'elle n'était pas de Prideland. Il avait quitté ces Terres il y a bien longtemps, mais n'en avait pas pour autant oublié son odeur, qu'il avait si longtemps côtoyé jadis.

    Un temps durant, il avait espéré que ce que Kuzali lui avait révélé était faux, et que les Pridelanders étaient toujours là. Mais désormais, face à cette autre lionne qu'il croisait sur Prideland et qui en était étrangère, il comprenait que la guerre avait bel et bien éclaté ici aussi. Alors, un doute traversa son esprit, pour revenir, plus perçant. Et si cette lionne était de ceux qu'on appelait Nyeusis ? Et si elle était responsable du malheur des Pridelanders ? Dévoilant légèrement ses crocs, le jeune mâle détourna légèrement la tête, sans quitter la lionne du regard, et déclara d'une voix sourde :

    ─ Tu n'es pas Pridelander.

    ------------------------------

     Et tandis que lui se tenait là, agressif et brutal, elle se tenait face à lui. Et lorsqu'elle releva les yeux, Hatari vit les larmes briller sous la lune. Il en perdit un instant sa violence, pour se plonger dans les iris de la jeune lionne. Si, d'ordinaire, la tristesse des autres ne l'atteignaient pas, ce soir là était différent. Dans tous les sens du terme. Trop de nouveautés en même temps. Trop de pensées et de sentiments qui se mêlaient les uns aux autres, formant une mêlée confuse et difficile à délier. Pourtant, lorsque la lionne se ressaisit, ce fut un masque défensif qui tomba, tandis qu'elle dévoilait ses crocs à son tour :

    ─ Comme tu ne l' es pas, toi non plus ..

    Un instant, le jeune mâle plissa les yeux. Qui était-elle pour l'affirmer ? Si Hatari n'était plus vraiment un Pridelander, il en était originaire, et en avait le sang. Elle ne pouvait sans doute le savoir. Mais alors, qui était-elle ? C'était une énigme bien étrange aux yeux de l'exilé. Si la lionne se tenait devant lui le pelage hérissé, ses yeux trahissaient une peur apparente. Et quelque chose d'autre. Une lueur bien familière, qu'il avait déjà croisé tant de fois. Dans son propre reflet. Elle avait vécu quelque chose de semblable. D'insurmontable. Ou du moins cela lui semblait l'être.

    ─ En es-tu réellement certaine ?

    Sa voix avait perdu de son agressivité, tout comme sa posture. Ses mâchoires n'étaient plus serrées, mais seulement entrouverte, et ses griffes n'étaient plus visibles. La tête à hauteur, il scrutait la lionne en silence. Il était partagé entre deux sentiments bien différents. Celui qu'il avait toujours suivi depuis des années ; l'indifférence et la méfiance, qui l'aurait amené à tourner le dos ou à rejeter la lionne. Et un autre, bien différent. Qu'il n'avait pas ressenti depuis bien longtemps. La compassion. Comme il comprenait la douleur qui lui déchirait sans doute le cœur. Car il en était certain, la lionne avait vécu quelque chose. Elle avait cette lueur, cette façon de se tenir qui la trahissait, comme elle trahissait tout ceux qui avaient rencontré au moins une fois la douleur et la tristesse. Un moment silencieux, Hatari finit tout de même par murmurer :

    ─ Les apparences sont parfois trompeuses..

    Il n'avait pas totalement perdu son air méfiant, et restait assez froid, mais il n'en pensait pas moins. Si sa phrase pouvait être comprise de différente manière, elle n'en était pas moins lourde de malentendus. Autant pour la lionne que pour lui. Ce serait simplement à elle de décider comment elle voudrait la comprendre.

    -------------------------------

    La lionne se leva, comme mue par un instinct primaire, et vînt s'asseoir à ses côtés, comme s'ils avaient toujours été amis. C'était un pas bien rapide dans leur relation, qui débutait à peine. Presque trop fort pou Hatari, qui n'était pas réellement du genre à apprécier un contact aussi rapproché aussi vite avec une presque inconnue. Et bien qu'elle ne sembla pas dangereuse, qui savait qui elle était réellement ? Toutefois, lorsqu'elle murmura quelques mots d'une voix à demi brisée, Hatari ne fut pas capable de s'écarter.

    ─ Écoutez, tout ce que vous avez à savoir pour l' instant est que je ne veux de mal à personne... Je suis ici à la recherche d' un nouveau départ. Pourrions-nous recommencer à zéro ?

    La lionne s'était entre temps levée pour aller boire, d'une démarche souple et gracieuse. Elle était étonnante. Un coup agressive, puis l'instant d'après presque suppliante. Hatari ne savait guère qu'en penser. Une partie de lui-même avait envie d'être méfiant et indifférent envers cette inconnue, parce qu'il en voulait encore au monde entier et qu'il était en colère, mais l'autre moitié, celle qui avait été caché bien longtemps - et que seule Niwata avait su découvrir - ne se sentait pas en mesure d'enfoncer la lionne dans ce qui semblait être une histoire compliquée. Soupirant légèrement, il s'assit, et resta silencieux quelque instant.

    ─ Il me semble que cela ne dépend pas de Moi. Je n'ai guère le pouvoir d'effacer le passé, bien que j'aurai aimé que ce soit le cas.

    Et tandis qu'il scrutait l'horizon étoilé, il se demandait quel choix il devait faire. Car il ne pourrait guère aller plus loin sans se décider. Rester l'exilé insoumis et solitaire qu'il était, et mettre un terme à tout cela sans chercher à savoir qui elle était et ce qu'elle avait vécu, ou bien renouer avec un lion pour la première fois depuis bien longtemps. S'il avait en partie choisit sa vie de solitaire à travers la terre des Lions, sans jamais se plaindre de la solitude, il se rendait compte qu'être avec un lion lui manquait. Au fond, peut-être était-ce parce qu'il n'avait jamais eu l'occasion de se retrouver d'égal à égal avec un congénère. Dans le désert, bien qu'il ait eut le même rang que chacun des Jangowas, il s'était toujours senti différent. Exclu.

    Et dans cette atmosphère si paisible, il réalisait qu'il avait encore la vie devant lui, et qu'il n'avait plus aucune obligation. Il pouvait rester ici jusqu'à la fin s'il le voulait. Il pouvait aller là où bon lui semblait, sans aucune obligation temporelle. Il était libre. Libre de faire ce qu'il voulait, et d'être avec qui il voulait. Il pouvait renouer avec quelqu'un. Il n'avait rien à perdre. Hatari se rendit alors compte que, finalement, il avait déjà fait son choix. Il ne voulait plus être l'exilé solitaire, ce soir-là. Juste un lion comme un autre. Alors, posant son regard dans celui de la lionne, il ajouta :

    ─ Pardonne-moi ma rudesse, les temps sont difficile.

    ---------------------------

    Alors qu'il terminait sa phrase, un léger rire s'éleva dans l'air, suivi d'une voix claires :

    ─ Ne vous excusez pas, je le conçois tout à fait. Excusez ma brève hilarité, je me rendais compte que je ne connaissais même pas votre nom. Pourrais-je vous le demander Monsieur ?

    Si tant est qu'il en était capable, Hatari sourit. Cette lionne avait quelque chose qui le faisait sourire. Peut-être cette petite étincelle dans ses yeux, ou bien cette capacité à passer - tout comme lui - de la colère à l'exaltation. Ou bien ce passé douloureux qu'elle semblait porter comme un fardeau, elle aussi. Peut-être était-ce ce qui faisait qu'Hatari se sentait semblable à elle. Pourtant, il ne savait rien de la lionne. Pas son histoire. Pas son Clan. Pas même son nom, comme elle venait si bien de le faire remarquer. Et tandis que lui réfléchissait, elle avait reculé de quelques pas, comme soudain hésitante. Surpris, le mâle baissa légèrement les oreilles. Avait-elle peur de lui ? Il ne lui ferait pas de mal. Il en était certain. Ou presque. Alors, d'une voix calme et sereine, il déclara :

    ─ Il me semble que le « vous » n'est plus de rigueur. Je suis Hatari.

    Penchant légèrement la tête - sans toutefois quitter du regard les prunelles de la lionne, qui le fixait aussi, il s'assit. Lui qui avait toujours cherché à paraître impressionnant et intimidant se rendait soudain compte qu'il aurait souhaité avoir l'air moins sauvage. Pouvoir effacer ses nombreuses cicatrices, preuves d'histoires houleuses. Et surtout la dernière, celle qui le brûlait encore parfois, comme pour lui rappeler qui il était désormais. Sa puissante musculature sur son corps longiligne ne faisait que rajouter à cela. Et sa crinière en bataille complétait le schéma du hors-la-loi. Autant dire qu'il n'était sans doute pas le genre d'ami qu'on recherchait.

    ─ Puis-je te demander à mon tour qui tu es, et d'où tu viens ?

    Au fond, il ne pouvait pas savoir. Certes, il n'avait plus guère d'ami fidèle. Mais n'en était-il pas responsable ? Avait-il jamais tenté de sympathiser ? Non, jamais. Pas depuis qu'il avait quitté Prideland, il y a de cela fort longtemps. Peut-être était-il temps de donner sa confiance à quelqu'un, et de faire confiance en retour.

    --------------------------


    Tandis que la lionne restait immobile et silencieuse, une légère brise vînt soulever son pelage et sa mèche, rendant la chose plus hors du temps encore. Et lorsque le vent s'intensifia un moment, Hatari n'y prêta guère attention. Dans le désert, les tempêtes étaient courantes, et nécessitaient de trouver un abri pour se protéger du sable brûlant, capable de fouetter et d'infliger des blessures bien pires que les griffes d'un lion. Mais ici, nul besoin de se cacher. Reportant son attention sur son interlocutrice, il remarqua le sourire qui se dessinait sur ses lèvres lorsqu'elle parla :

    ─ Je me nomme Wakanda, enchantée Hatari. Je viens des Terres Oubliées, qui sont loin au Sud de Freeland.

    Les Terres oubliées. Hatari n'y avait jamais été. C'était plutôt rare de croiser un lion issu de là-bas sur la Terre des Lions, d'autant plus une femelle de cette âge. C'était original. Comme son pelage, au fond. De multiples rayures, un regard hors du commun, et un caractère bien mystérieux. Si lui n'avait rien d'original, il n'en était pas moins heureux de rencontrer Wakanda. Si son propre pelage était semblable à n'importe quel Jangowa, et sa carrure longiligne assez commune aussi, son histoire faisait de lui quelqu'un de différent. Ou peut-être l'avait-il toujours été.

    Tandis qu'il songeait à celà, une violente rafale de vent souleva la moindre feuille morte au sol, agitant par la même occasion la crinière dorée d'Hatari. Immobile, il ne broncha pas, appréciant le spectacle. Il aimait à penser que le temps était mu par quelque chose, et que les intempéries extrêmes étaient comme une rébellion. Une façon de protester, ou d'asseoir sa supériorité. Et en l'occurrence, les éléments étaient les maîtres incontestés de ces Terres. Même le plus grands des Rois ne pouvaient rien contre eux. Fermant un instant les yeux, le mâle tenta de se remémorer une tempête sur Prideland. Mais, il eut beau chercher aussi loin qu'il le pouvait dans ses souvenirs, il ne trouva rien. Seulement quelques miettes, aux côtés d'Usiku. Le traître.

    Un sourd grondement résonna alors, comme si la terre tremblait. Mais personne ne s'y méprendrait. Ce n'était pas le sol, mais le ciel qui grondait, annonciateur de pluie torrentielles. Quelques instants plus tard, un éclair blanc déchira le ciel, et l'exilé ouvrit de nouveau les yeux. Un autre grondement, plus sourd encore, se fit entendre, et il songea qu'il allait peut-être devoir changer ses plans, et trouver un abri. Ne serait-ce que pour éviter d'être trempé. Néanmoins, la foudre et le vent ne faisaient pas bons ménages, et rester dehors par ce temps pouvait être dangereux. Toutefois, nul besoin de se précipiter. Il avait le temps de prévenir Wakanda.

    Ce fut seulement en posant à nouveau les yeux sur elle qu'Hatari remarqua son air effrayé. On pouvait lire la panique dans ses yeux, et son corps était animé de tremblements. Perplexe, le mâle fronça les sourcils. Avait-elle peur de l'orage ? Ou avait-elle aperçu un danger quelconque ? Se levant, il s'approcha d'elle tandis que le tonnerre grondait une nouvelle fois. Peu importe ce qu'il se passait, Wakanda ne semblait pas vouloir rester là. Et comme il ne voulait pas se montrer brusque ou irrespectueux envers elle, mais qu'il n'avait pas non plus envie de mettre un terme à leur rencontre, il demanda doucement :

    ─ Tu sembles soucieuse. Préfère-tu que nous trouvions un abri ?

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    Et tandis que lui attendait une réponse, sans perdre son calme, l'orage continua de monter. Hatari n'en fit rien, il aimait voir les éléments se déchainer. C'était comme une puissance impossible à atteindre. Quelques chose d'extraordinaire. Et les gros orages n'étaient pas si courant sur la Terre des lions. Toutefois, lorsqu'il reporta son regard sur Wakanda, il compris rapidement que les choses n'étaient pas identiques pour la lionne. Affalée par terre, elle tremblait de tout son corps, incapable de se contrôler. Le grand mâle ne comprenait pas vraiment. Toutefois, il ne voulait pas la juger. En peu de temps, Wakanda lui était devenue sympathique, et il ne voulait pas casser une première rencontre si positive pour lui.

    Comme il ne savait pas vraiment ce qu'il pouvait faire, il tenta de réfléchir. Toutefois, il n'avait pas beaucoup de temps. L'orage avait déjà commencé, et s'il était une chose dont il était certain, c'est que Wakanda ne voulait pas rester là. Ils devaient trouver un abri. Il aurait pu aller en chercher un et revenir la chercher, mais il doutait qu'elle supporterait de rester seule. Debout, contemplant les alentours, il laboura le sol de ses griffes sans réellement s'en rendre compte. Il connaissait ces Terres - il y avait en partie grandit - mais il n'arrivait pas à se souvenir d'un quelconque abri. Soupirant, il ferma alors les yeux, et se concentra. Il plongea loin dans ses souvenirs, si peu nombreux. Et il se rappela avec bonheur d'une petite grotte. C'était là qu'il se cachait avec Usiku quand ils se faisaient surprendre par le mauvais temps. S'approchant de la lionne, il se pencha vers elle, et souffla :

    ─ Je connais une grotte non loin d'ici. Nous y serons à l'abri. La pluie sera bientôt là, et l'orage ne cesse de monter. Viens avec moi.

    Gentiment, il lui donna un petit coup de tête. Puis, il attendit qu'elle se lève. Il espérait qu'elle le ferait. Cela ne le dérangeait pas plus que ça de rester ici, mais être trempé n'était pas une chose qu'il appréciait particulièrement, surtout lorsqu'il y avait du vent.

    ------------------------------

    Après qu'ils se soient longuement regardé l'un et l'autre droit dans les yeux, comme pour y puiser quelque chose, la lionne se leva avec lenteur. Elle était encore tremblante et pantelante, mais semblait reprendre peu à peu le contrôle d'elle-même. Néanmoins, elle semblait encore paniqué à l'idée que le pire n'était pas encore passé. Le grand mâle - pendant ce temps - ce demanda ce qu'il redoutait le plus. Et il eut beau scruter les profondeurs de ses souvenirs, il ne trouva rien qui l'ait mis dans un tel état. Absolument rien. L'un après l'autre, ils se mirent donc en marche vers la grotte, aussi rapidement que Wakanda le pouvait.

    Quand ils l'atteignirent, la lionne rayée s'effondra sur le sol - comme vidée de son énergie - et se mit à sangloter. Néanmoins, elle souriait. L'exilé ne su réellement qu'en penser. Était-ce le contre-coup ? Ou plutôt une pensée qui venait de lui traverser l'esprit ? Qu'importait, puisqu'elle déclara ensuite d'une voix calme :

    ─ Je .. merci Hatari..

    Puis, sans un mot de plus, ses yeux se fermèrent, et elle s'endormit en quelques minutes. Épuisée, elle devait l'être. Et si Hatari aurait pu se lever, et quitter les lieux - maintenant que son interlocutrice était à l'abri - il n'en fit rien, et se coucha non loin d'elle. Et tandis que la pluie se mettait à tomber à verse - empêchant le mâle de voir au delà de la grotte - Hatari sourit. Il était heureux. Cette rencontre, qui n'avait pas duré plus d'une heure, venait de changer bien des choses. Et ce n'était sans doute que le début.

     
       

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